#boost #9 | Kafka minute (mais une pleine minute !)

sommaire général du cycle;
_ sur Patreon, téléchargement docs d’appui (Franz Kafka, Je ramais sur un lac, et Virginie Poitrasson, 70 secondes d’anxiété), plus inscription et publier vos contributions, plus Zooms etc.);
_ contributions à envoyer par mail de ce dimanche 23 mars au samedi 29 max.

Quelle collection ces «moments» avec traversée du temps, dans la proposition précédente. Pas question de ne pas continuer à creuser dans une continuité.

Prendre un de ces «moments», avec lequel vous avez une affinité particulière. Un souvenir plus précis des circonstances (elles ne seront pas évoquées ici non plus). Ou bien parce que simplement vous y attache un sentiment d’énigme, une intuition qui peut être parfaitement abstraite.

Dans le livre Tantôt, tantôt, tantôt dont nous sommes servis proposition #07, «conjurations», Virginie Poitrasson conclut par une section nommée «exercices» dans lequel elle fait la proposition suivante, et y répond bien sûr: 70 secondes d’anxiété, et qui comporte effectivement 70 paragraphes hyper brefs mais toujours hyper précis et narratifs, et qu’on peut lire de façon synchrone (essayez, c’est très formateur!) en faisant battre un métronome à la seconde et adaptant la vitesse des phrases selon la longueur…

Ce principe de décomposition-restructuration est une belle piste, mais préféré, tout en la gardant très précisément à l’idée, une suite de textes de Kafka, liasse A, 1920 (donc dans les fragments narratifs et pas dans le journal), ici dans traduction Marthe Robert et repris dans le recueil Préparatifs de noce à la campagne, trois fragments sous forme de bloc-paragraphe — et merci absolument respecter, au nom de ce si beau partage qui nous rassemble — de 3 formats légèrement différents: 70 mots, 150 mots, 230 mots.

Nous n’allons pas reconduire le protocole de versions successives qui nous a si bien réussi pour les «moments» mais je suis prêt, si par exemple votre premier envoi est dans cette fourchette suggérée des 150/230 mots, à une version bis, plus vaste ou au contraire plus concentrée, que vous m’enverrez le vendredi 11 (et uniquement à cette date) pour un PDF V2.

«Je ramais sur un lac»: durée une minute, silence et geste répété de l’aviron dans le mouvement lent et régulier de la barque, le contexte une grotte mais donc sa minéralité, la couleur et les reflets, et puis, au terme des 230 mots, un geste et un seul.

Principe de la proposition : sur la base d’un de ces «moments» de la proposition #08 (vous seul·e saurez lequel et pourquoi), isoler une durée d’une minute, et faire que les 230 mots soient totalement synchrones de cette minute, ainsi devenue fil narratif, perceptions, sensations auditives, visuelles ou olfactives, émotions (j’ose rarement le mot) latentes pour ce qui est de l’intérieur, l’attente, l’impatience, le rejet, l’abandon, et, pour qu’il y ait écriture, sans jamais chercher le fantastique dont Kafka fait chaque fois comme un miracle, s’en remettre le plus totalement possible à la fonction poétique de la prose.

À vous le bloc de 230 mots, fourchette basse 150 mais pas moins, et cette quête d’une poétique de la prose qui surgit précisément de cette durée qu’on investigue comme Virginie Poitrasson avec ses 70 paragraphes numérotés (nous ne numéroterons pas) de ses 70 secondes d’anxiété, le récit intérieur d’un temps, séparé arbitrairement de toute connotation autobiographique, mais ouvert à toutes sensations, perceptions et mouvements intérieurs, au moins un, si faible qu’il puisse nous sembler.

À vous et bonne écriture !

A propos de François Bon

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2 commentaires à propos de “#boost #9 | Kafka minute (mais une pleine minute !)”

  1. frappé de lire à quel point nos « minutes » sont traversées/animées/innervées par des efforts des un·es et des autres en vue de leur dramatisation — cela peut passer par la concentration ou réduction des moyens,

    Isabelle : l’absence de ponctuation ;

    Laurent : l’usage des tirets ;

    produisant aussi bien de la suspension que de la tension (ce qui peut revenir au même, c’est le suspense)

    — cela passe (le courant) par la polarisation de tout le bloc-texte par un de ses éléments,

    Rebecca : une seule goute ;

    Isabelle : l’eau monte ;

    Alexia, Clarence :
    des mots (en passant ou en particulier, ciblés), leurs effets (leur dévastation) ;

    Pierre : un blanc (et ce blanc devenant masque : comme si la pensée ou son défaut se retournait sur le visage comme un gant ?) ;

    — ou par la focalisation sur un élément,

    Juliette : l’abeille (et le dilemme : choisir entre elle et son image) ;

    Caroline : une faille dans les fleurs ;

    Perle : le doigt dans la buée ;

    — et cela parfois survient sans prévenir, à la toute fin, comme débordant le texte,

    Nathalie : de très grands yeux (ce zoom soudain, auquel la diversité des annotations constituant le tableau par touches successives ne préparait pas, et c’est comme une béance) ;

    Hélène : des corps tombaient (et c’est passer soi-même de l’autre côté…) ;

    Cécile : l’adresse à la sortie de l’ascenseur (que qui t’a lue/suivie jusque là peut aussi prendre pour el·lui) ;

    … également frappé par l’effet que ces « minutes » font sur le corps,

    Alexia, Isabelle, Laurent, Hélène…

    ou comment elles trouvent à s’y loger — et à s’y déplacer, insaisissables, toujours ailleurs

    … à travers ces mises en tension/suspension, c’est le récit qui est à l’œuvre — comme si nous nous étions les un·es et les autres spontanément mis dans la position de raconter, ou remis dans nos peaux afin de re-sentir, partager, faire sentir, comme en direct (usage généralisé du présent), et tenter de comprendre (mettre des mots sur) ce qui a pu nous traverser pendant cette minute — ou comment cette minute-même nous a traversé·es, et peut-être changé·es ?

    … c’est encore — ces dramatisations, ce récit qui comme spontanément se met à tourner, tourbillon — que ce sont des minutes élues, moments choisis par chacun·e — des formes d’éminences, de pics —, c’est que ce sont des minutes reconstituées : des minutes narrées

    (et mes excuses à cell·eux sur les textes desquel·les je suis passé trop vite)

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