Mow à peur de l’oubli, peur de ne plus se souvenir, peur de perdre la tête. Elle a peur d’oublier. Elle a classé ses peurs, en a fait une longue liste, les a rangées dans l’ordre. L’ordre a beaucoup changé, elle en a rajouté, n’en a jamais enlevé et dans l’ordre aujourd’hui et depuis un moment, l’oubli vient en premier. Elle a peur d’oublier tous les bons souvenirs mais les mauvais aussi par peur de les refaire.
Mow parle peu, parler lui fait peur, peur des mots qui s’envolent quand ils ne sont que sons, qu’on ne peut plus rattraper, qu’on ne peut plus changer, modifier, corriger, affiner, peur du trop vite des mots quand on les dit, peur de ne pas avoir assez réfléchi, peur de se rendre compte, après, peur de se rendre compte, trop tard, peur de ne pas avoir l’idée, la bonne idée, au moment opportun. Alors elle veut écrire pour parler de ses peurs, pour réussir peut-être à faire parler ses peurs, peut-être comprendre ses peurs, les poser sur le papier, s’en débarrasser, leur coller à chacune une étiquette de mot, les appeler mot et ne plus les appeler peurs et puis les oublier, cet oubli-là ne lui fait pas peur. Elle veut partager ses peurs avec ceux qui liront son livre, partager ses peurs en tellement de lecteurs que les morceaux deviendraient tout petits, des morceaux si petits qu’ils deviendraient insignifiants, inexistants, que ses peurs n’existeraient plus. Mow a beaucoup trop de peurs, elles prennent toute la place bien au-delà de la place normale des peurs. Tout le monde a des peurs ou alors on est mort de ne pas avoir assez fait confiance à la peur et d’être allé trop loin. Mais Mow a trop de peurs, ça déborde bien au-delà des peurs à écouter pour ne pas sauter dans le vide, au-delà de la peur du vide. Comme tout le monde, Mow a la peur du vide, mais peur de tous les vides, peur des vides dans sa tête et peur du vide dehors, peur du vide des oiseaux, des arbres et de la mer, elle a la peur des autres et la peur d’être seule, peur de ne plus voir personne, les vivants et les morts, peur de ne plus savoir regarder un peu plus loin, peur de plus savoir regarder quelqu’un d’autre, peur de ne plus savoir regarder tout court, peur de ne plus savoir faire de photos pour garder son regard, peur de ne plus savoir faire les photos qui éloignent l’oubli, peur de ne plus pouvoir vendre ces photos qui font vivre et qui donnent à manger, peur de ne plus avoir de quoi manger, et peur de ne plus vivre, mais peur de vivre aussi et surtout peur des autres, peur de leur parler, peur de les écouter, et puis peur qu’ils s’éloignent, qu’ils partent avec ses mots. Mow a peur de s’attacher, de devenir dépendante et de mourir de froid si jamais l’autre s’éloigne comme la dernière fois, elle a peur de ce froid, du froid de la solitude, mais elle a peur des autres. Mow a peur de ses rêves, peur de perdre ses rêves, peur que ses rêves s’en aillent et qu’il ne reste plus rien d’autre que les cauchemars.
Codicille :
Mow est la personnage née dans le cycle LVME, elle était dans ma tête, alors je lui ai fait des peurs plus ou moins sur mesure, histoire de la connaître encore un petit peu mieux. Peut-être à peaufiner du côté de la photo et du rôle anti-oubli qu’on peut lui assigner. Mow reviendra sûrement pour nous parler de tout ça.
un bien joli personnage au joli prénom avec qui je partage bien des peurs… dont certainement celui de l’oubli…
dont certainement celle de l’oubli ! pardon ! comment ai je pu faire cette erreur
Merci pour la lecture, Véronique, merci également pour Mow, ça m’encourage à développer le personnage !
Quant à l’erreur, rajouter peur de l’erreur ?