Tenir tête — face à l’incertitude — lutter contre malgré le doute — Le tremblement de ma lèvre supérieure — Même si on se sent plus ou moins seul — On ne relève pas ce qui vient — Il s’insinue dans chaque faille — ronge les contours du jour — détruit les certitudes les unes après les autres — Il y a l’angoisse sourde du soir au moment de se coucher — celle qui s’accroche à la peau malgré nous — ralentit le pas et l’alourdit dans la journée — Tout vacille autour de nous — il y a des visages et des fuites — Les images affluent — sans fin — sans répit — constellation d’instants diffractés — trop de visages — de cris étouffés — trop de regards qui ne me voient pas — Il y a le mépris des autres — Il ronge — Il pèse — bouleversé par ce contact — Ce n’est pas arrivé en un jour — Il enferme dans la marge — toujours à côté — jamais avec — Les pensées se retournent contre elles-mêmes — cercle d’ombres — en spirale — Avancer malgré le poids — de la possibilité de l’approche — malgré la fatigue — les silences — Maintenir le cap quand tout s’effondre — Résister au renoncement — à la tentation du vide — à l’érosion des élans — jour après jour la disparition de l’envie — le corps progresse en équilibre — Ne pas céder — Pas cette fois — Pas encore — Même si tout pousse à plier — Une lumière peut-être — s’étirer pour aboutir à cette lumière — au loin — non pas une lumière mais un frémissement — sous la forme de la légèreté d’un nuage — Il y a le bruit du vent — peut-être est-ce un mot à peine prononcé — ou toujours le même qui se répète — inaudible — déjà oublié— et ça ne change rien — Le paysage se dérègle et se brise avec moi — Quelque chose appelle et repousse — ou existe seulement dans ce qui fut — murmure indistinct — ombre sans corps — le mouvement figé de sa propre chute — Dehors semble sous attente — On respire mal le nez bouché — Les murs se resserrent — ou l’espace se dilate — au point où la ville s’arrête — Le temps s’efface — c’est ce qui nous retourne — La mémoire est un piège — les souvenirs se modifient en se rétractant — derrière la porte qu’est-ce qu’on entend ? — Ne pas répondre — ne pas chercher — avancer — entre la chair la pierre et les morts — il faut être beaucoup de choses à la fois — ou rester là — Faire front
Codicille : Résister face au doute, à l’incertitude, au flot d’images qui nous assaille, à nos inquiétudes, à tout ce qui passe autour de nous, ce qui nous agresse, ce qui nous met hors de nous, nous révolte, les pensées sombres, la tentation du renoncement, ce qui nous maintient hors de nous,tout ce qui nous empêche d’avancer, nous entrave, nous ralentit, ce poids sur les épaules, la méchanceté, le mépris dont on peut être victime, ce sentiment d’incompréhension face à la violence, à la douleur, la peur de la mort, de passer à côté de sa vie, d’avoir à renoncer à certaines choses, de voir sa vie défiler sans s’y reconnaître.
Tant d’échos par ici, merci de ces rappels, avec affinité particulière pour les nuages.
Merci beaucoup Juliette, très touché. Ce texte s’est écrit autour du cadratin, je n’ai pas l’habitude de découper ainsi mes textes, mais cette « obligation » a débloqué un désordre à l’intérieur qui seul pouvait tenter d’approcher ce qui empêche, ce qui entrave.
J’ai l’impression de comprendre l’exercice en lisant ce texte — Encore que– il faut se méfier des premières impressions — on ne sait jamais — mes certitudes pourraient bien me jouer des tours– restons humble– le meilleur moyen de faire face, sans doute– encore que–sans doute n’est certainement pas approprié– revenons au début– recommençons– la répétition nous en apprend beaucoup– il faut tenir la durée– s’interesser au comment plus qu’au pourquoi– peut-être– dire merci en tous cas ( Merci
PS: je ne sais pas pourquoi le tiret cadratin me tient tête aujourd’hui… encore un mystère.