#LVME #02 | duo avec fibre

A l’étage, on a sonné. Deux hommes en sweats à capuches. Avant eux, le bruit d’une perceuse à percussion a déjà fait vibrer le béton quelque part dans le bâtiment, difficile de localiser le bruit, de savoir à quoi il correspond. Mais là, les deux hommes, tenant une perceuse, un escabeau et d’autres instruments, se présentent : pas de doute, c’est pour l’installation de la fibre. Rendez-vous pris par ceux qui vont l’adopter, maintenant qu’elle est dans le quartier. Le plus grand lève la tête vers le plafond du palier dont le couvercle a été retiré il y a peu : il observe les fils qui se croisent, pendent pour certains, comme des écoutes sans voiles ou des cordes à linge alourdies par un poids invisible. Il rassure : bientôt le faux-plafond sera remis, on ne verra plus rien, ça circulera en-dessous. L’autre se dirige vers l’armoire électrique commune, l’armoire fibre du palier : comme un chirurgien penché sur les vaisseaux, il vérifie les câbles, les branchements, manipule des brassées de fils conducteurs, dit : c’est bon, et revient vers son alter égo. Peu de mots : où est votre box ? on peut entrer dans l’appartement ? Rapide coup d’œil pour évaluer le trajet du câble jusqu’à la prise téléphonique, dans le salon. Présente l’opération : on va devoir percer au-dessus de la porte d’entrée, dans l’angle. Après, on fera courir le fil en haut, il longera la goulotte déjà posée, redescendra en longeant la porte qui donne sur le salon, passera en-dessous jusqu’au boitier pour le raccordement et on n’en parlera plus, vous serez tranquille. Le locataire n’a pas de questions et regarde le technicien calé au sommet de l’escabeau pour perforer le béton. Poussière de la trouée. Le second fait suivre le câble qui traverse le ciel du palier commun, le récupère dans l’espace privé après passage par le trou tout frais, un peu le chas d’une aiguille. Le premier a déjà installé l’escabeau à l’intérieur pour l’agrafage pendant que le second, agenouillé près de la prise téléphonique fixe les derniers éléments. Parfaite chorégraphie des deux hommes en sweats à capuches qui ne perdent pas une miette de temps. En jetant un dernier coup d’œil sur le circuit créé, ils rassemblent leurs outils, appellent l’ascenseur. Vous verrez, ça ira bien mieux maintenant. S’il y a un problème, vous avez notre numéro. Le locataire remercie, les portes de l’ascenseur se referment sur le duo qui disparait comme après les saluts en laissant sur place le fil de son intervention.

A propos de Christine Eschenbrenner

Génération 51.Une histoire de domaine perdu, de forteresse encerclée, de terrain sillonné ici comme ailleurs. Beaucoup d'enfants et d'adolescents, des cahiers, des livres, quelques responsabilités. Une guitare, une harpe celtique, le chant. Un grand amour, la vie, la mort et la mer aussi.

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