# écopoétique #10 bis | et là

Je l’ai pris quelque part, ça peut toujours servir – il ressemble aux graviers mais seulement dans le ton, pas dans la taille, un peu dans la forme – ces choses-là n’ont que peu de standard (on doit peser, je suppose, après les avoir produits – la route de Louviers, les tas de cailloux, et les autres en Guyane et en Nouvelle-Calédonie, les cailloux se cassent, on en fait des poussières) mais celui-là (je pourrais le peser, cinq ou sept grammes peut-être : vingt-cinq ou trente carats…) est du même tonneau pourtant, il brille seul dans le soir – un endroit sûrement devant un immeuble, un truc pour décorer, pour empêcher les malheureux sans-abris réfugiés elles aussi et leurs enfants, de s’abriter et se protéger, quelque part en ville, c’est sûr – on les chasse – pourquoi ? mais je ne pensais pas à lui, c’est à un moment où j’avais un peu abandonné l’idée, pas vraiment puisqu’elle traîne depuis bien des années, mais abandonnée pour réengranger des informations, et puis il s’est trouvé dans ma poche de veste – c’était là, à côté de la petite cuillère et je me disais que tout de même, j’avais à m’expliquer, en suite du reste, des débuts, des approches, des façons de faire comme les siennes, contournées évoquées suggérées, par questions interposées, ce n’est pas un type que je connais, du tout, il se présente sous les traits d’acteurs que j’aime bien, c’est vrai mais c’est à peu près tout – j’avance doucement, je n’ai aucun scrupule : parfois me reviennent des images sans relation, sinon qu’elles sont là, et puis je les oublie, c’est à nouveau à nouveau à sa fin que je pense – alors il s’agit d’une allée bordée d’ifs, légèrement en montée, située vers le sud du bourg, à une cinquantaine de kilomètres au nord-est de la capitale – il y a là un portail en fer forgé sur lequel, soudé en lettres majuscules, on peut lire

N E M I N I P A R C O

(personne n’est épargné, en clair) (le village se nomme Torrita Tiberina) on entre si c’est ouvert (il y a des heures pour ça) et au bout de l’allée se trouve cette espèce de petite construction, caveau de famille (le peu d’Eleonora y repose – elle s’en est allée le dix-huit juillet de la dixième année de ce siècle) au devant duquel on se recueille sans doute toujours – en tous cas, certainement tous les 9 mai – personne de ses amis politiques ou pontoficaux ou autres encore n’était invité, il y avait une foule de curieux comme il se doit peut-être, mais vers le onze, on le mit là, décédé. Le petit caillou, en passant, pur, pour nous souvenir que nous aussi, nous sommes appelés

M E M E N T O M O R I

(rappelle-toi que tu mourras) quelque chose de ce genre et pour y penser, un petit caillou blanc

A propos de Piero Cohen-Hadria

(c'est plus facile avec les liens) la bio ça peut-être là : https://www.tierslivre.net/revue/spip.php?article625#nb10 et le site plutôt là : https://www.pendantleweekend.net/ les (*) réfèrent à des entrées (ou étiquettes) du blog pendant le week-end

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