#écopoétique #08 | côte sauvage

Il brume; un rideau vaporeux au confluent des lignes de fuite, amollit les blockhaus. À droite le ciel moutonne. Les piétons, ils sont rares, marchent dans l’autre sens en direction du phare, ils ne s’alarment pas de la présence d’une bicyclette qui roule sans se presser : interdit aux vélos, signale un pictogramme à chaque intersection ; sur arrêté préfectoral la digue, depuis qu’elle a été refaite, est réservée aux marcheurs : Les assauts de la mer sauvage, de la houle et des tempêtes ont eu raison de l’ancienne, un ouvrage de béton à enrochement la remplace. Côté mer derrière le parapet, des blocs de granit où se nichent résidus plastique, bois flottés, cadavres d’oiseaux. Un tronc échoué se dresse: priapique. Totem dérisoire, mât de personne. Côté champs, sur le bord ensablé où le béton s’effrite, de drôles de fleurs jaunes en pelotes, méli-mélo de tiges caoutchouteuses, que le vent fait rouler; la couleur jaune rompt la monotonie grise du béton. J’ai plongé dans mon sac pour chercher l’appareil, le carnet tombe ; une mouette crie. L’eau s’est retirée si loin : j’hésite à descendre. J’enjambe le parapet et je regarde, par-delà le champ d’algues, de flaques, de roches, la courbure de l’horizon. J’allume une cigarette imaginaire, tige humide tirée de la poche du caban avec ce briquet tempête trouvé derrière le calvaire du port, il me demande comment je vais – je l’ai rêvé souvent – , mais il n’y a personne; je réponds que me yeux me trahissent. Un oiseau plonge, point minuscule dédoublé et flou. L’océan retiré au plus bas, stagne. Quelques vagues molles se défont sans atteindre le rivage. Cette tache verte qui se déplace latéralement se penche et se redresse est-ce un pêcheur de coques ?

A propos de Nathalie Holt

voilà ! ou pas

8 commentaires à propos de “#écopoétique #08 | côte sauvage”

  1. L’éloignement de l’eau et la déliquescence des silhouettes. Inaccessible retour à la parole vive. Quelque chose d’informe disséminé à perte de vue. Même la photo perd ses prises devant un Océan fugueur. Le « blockaus ramolli » et le « priapisme » d’une écharde de bois géante font perdre espoir de retrouvailles vives. Le pêcheur de coques ne se retourne pas. Presque une scène de Mort à Venise…

  2. « Côté champs, sur le bord ensablé où le béton s’effrite, de drôles de fleurs jaunes en pelotes, méli-mélo de tiges caoutchouteuses, que le vent fait rouler; la couleur jaune rompt la monotonie grise du béton. J’ai plongé dans mon sac pour chercher l’appareil, le carnet tombe ; une mouette crie. L’eau s’est retirée si loin… » merci de nous embarquer avec toi

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