#écopoétique#2 | ce qui reste après leur passage

Le mieux c’est d’avoir des poules. Je les ai installées tout de suite. Enfin, le plus tôt possible. Parce qu’il fallait d’abord leur créer un enclos dans lequel il y aurait un grand chêne dans un angle pour l’ombre. Un enclos grillagé avec les bordures enfoncées profond dans la terre. Les prédateurs sont nombreux par ici, aptes à gratter pour se faufiler sous les clôtures — pas seulement les renards, aussi les fouines, les belettes sans compter les autours des palombes ou autres rapaces qui, eux, font fi des clôtures et pourraient en faire leur dîner. Puis nettoyer la petite dépendance en pierre, construire un grand nichoir et une échelle en bois récupéré, garnir de paille. Après seulement elle sont arrivées, trois jeunes rousses, apeurées au début. Une bonne semaine pour qu’elles s’acclimatent et sortent découvrir leur nouveau monde. A présent elles n’arrêtent jamais, toujours à cavaler, à gratter, à picorer l’herbe et les mottes. Tout ce qu’on leur donne finit par y passer, suffit de couper en petit les pelures, les trognons, les écorces. Non seulement elles sont familières et joyeuses mais elles font des œufs avec un jaune si intense en couleur qu’on mesure le soufre qu’ils contiennent, indispensable à nos articulations. Elles adorent les graines de melon, les peaux de raisin, les restes de riz, le gras de jambon. De toute façon après leur passage il ne reste rien. Elles ont des noms bien sûr, elles connaissent ma voix et se laissent volontiers prendre sous le bras et caresser sous la gorge.

A propos de Françoise Renaud

Parcours entre géologie et littérature, entre Bretagne et Languedoc. Certains mots lui font dresser les oreilles : peau, rébellion, atlantique (parce qu’il faut bien choisir). Romans récits nouvelles poésie publiés depuis 1997. Vit en sud Cévennes. Et voilà. Son site, ses publications, photographies, journal : francoiserenaud.com.

2 commentaires à propos de “#écopoétique#2 | ce qui reste après leur passage”

  1. Ma sympathie pour tes poules est immédiate. Elles me ramènent à bien des souvenirs et je les ai toujours considérées comme de gros oiseaux aimables, acceptant de nous côtoyer malgré nos manies d’exploitation pour leurs oeufs, leur chair et leurs plumes. Je plains leur sort industriel et loue le soin qu’on peut mettre à les préserver des prédateurs dont les chiens qui aiment bien leur voler dans les plumes en meute et les célèbres funestes renards qui en font leur quatre-heures en catimini… Les voir picorer dehors et rentrer plus ou moins sagement dans leur cabane duplex est un plaisir facile. On parle aux poules et elles nous répondent. Marie Morel avait consacré à une dessinatrice éprise de poulailler un numéro de sa Revue j’ai rencontrée cette artiste il y a une dizaine d’années lors d’une exposition de ses poules ( dites de luxe…) calligraphiées… https://actu.autun.com/actualite/les-poulettes-sexposent-a-la-galerie-du-passage/

  2. oui, les poulettes suscitent une grande sympathie. Il faut dire qu’elles sont tellement drôles et touchantes quand elles courent vers toi qui porte la gamelle… elles m’étonnent tous les jours et elles sont de véritables nettoyeuses de territoire !
    merci à toi pour ton passage et ton intérêt
    et c’est vrai qu’elles sont souvent objet de dessin pour les artistes… (merci le lien vers Chantal Dunoyer)

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