Le fait que nous soyons en voiture ne change rien en ce jour de juillet. Les paysages défilent. Nous venons de quitter la ville et ses grandes maisons perchées, ses arbres foisonnants et sa gare déjà pleine de touristes. Jupes et shorts, bobs et casquettes, appareils photos en bandoulières ou selfies rapides au portable, les uns mangent, d’autres boivent, certains semblant dormir debout, perdus dans leurs rêves. Dos adossé au bus, le visage tourné vers le soleil, le chauffeur fume tranquillement, laissant les volutes de fumée s’envoler vers les nuages. Le ciel est bleu. L’air est déjà chaud. Attablés à une terrasse de café, quelques hommes d’affaires discutent, côté à côte. Le fait qu’il y ait des sans-abris, quelques dealers et une voiture de police circulant lentement devant la gare, n’empêche en rien de savourer ce début de matinée. Nous venons de quitter la ville et ses hauteurs. Sa fournaise de la veille, sa frénésie, ses cocktails, ses rires, ses ventres ronds, ses robes chatoyantes et ses talons hauts. Le fait que certains n’aient rien à manger sur les trottoirs, n’a enlevé en rien le plaisir des poissons roses et ses effluves de citron, des burgers dégoulinants de gras et ses frites trempés dans le ketchup rouge, de la voracité des silhouettes penchés sur les assiettes colorées. Nous venons de quitter la ville et ses cathédrales, le son de ses clochers et le silence de son baptistère. Et il est bon de remarquer que le fait que Dieu soit dans tous ces lieux ne perturbait en rien les déambulations fiévreuses des femmes et des hommes, rentrant et sortant des boutiques, les bras débordant d’emplettes de mille et une choses inutiles. Le fait que nous roulons en voiture en ce matin d’été ne change rien à nos souvenirs agités de cette foule fluctuante que nous avons fréquenté.