#anthologie #26 | bande-son

Seule sur le canapé, vieux casque en mousse sur les oreilles, j’appuie sur le bouton du Dictaphone, en mode écoute. Le bruit du bouton gris qui s’enfonce, de la bande magnétique qui se déroule, son ralenti au départ, la bande  de la cassette s’est détendue avec les années. D’emblée, pas les mots qui m’assaillent, mais les bruits. Comme dans ces photos où l’on remarque les sabots aux pieds, la coupe de cheveux, le dos nu, et efface le point de vue photographié, le rocher de Biarritz, le portail de Cambridge. Voix qui se superposent, se multiplient, parfois se répondent. On se coupe la parole. Rire. Clameur à l’arrivée du plat. Bruit de la cuillère dans l’assiette, tape contre l’assiette pour vider le contenu de la cuillère, assiette suivante, bruit de la cuillère, on s’apostrophe. Aboiement de la chienne. Voix par-dessus les aboiements. Elle n’obtient pas la parole, fait tinter la cuillère contre le verre, verre en Pyrex. Une seconde de silence. Brouhaha. Assiettes servies. Une seconde de silence aussitôt interrompue « un ange passe ». Débit rapide. Tu le connais? Parler comme on court. Il parle par-dessus, comme on marche par-dessus, il parle lentement, ménage ses effets. Rires. Je reconnais l’éternuement, nécessairement commenté, un éternuement comme un tremblement de terre, un éternuement expressionniste. Voix d’enfant. Imite l’oncle, s’entraîne à raconter des histoires drôles. S’ajoute la télé qu’on vient d’allumer « à la pêche aux moules moules moules » Pousse-toi, ton père n’était pas vitrier. Râlerie. 

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