La grand-mère est aux aguets. Quelqu’un vient. Une bête peut-être. Des branches craquent, des feuilles mortes se brisent sous des pas légers. C’est un animal furtif mais c’est un animal qui parle. La grand-mère a l’impression que ce grognement, ce sont des mots mais dans une langue qu’elle ne connaît pas, ni du français ni du patois, une langue étrangère où chaque son s’envole après avoir été lancé, une langue aigüe et mélodieuse, imitant le chant des oiseaux. Qui va là ? La grand-mère n’a pas osé demander. Au loin, la rivière gronde. Il a plu, peut-être pleut-il encore. Des gouttes tombent lentement des arbres, s’écrasent sur la terre de plus en plus rarement, comme si elles s’évaporaient. La voix reprend, criarde mais joyeuse, voix de belette ou de petite fille, elle parle toute seule comme souvent la grand-mère la nuit quand les enfants dorment, elle se raconte des histoires, éclate de rire, se rapproche. La grand-mère a chargé son fusil. On ne sait jamais. Quelque chose s’est faufilé quelque part au-dessus de sa tête, quelque chose a sifflé. La voix parle maintenant plus bas, elle est tout près mais semble s’effacer au fur et à mesure qu’elle s’approche de la grotte, où les enfants poussent ces petits gémissements qui annoncent leur réveil prochain. La voix s’est tue mais les pas sont là, à quelques mètres. Ils ralentissent. La grand-mère a posé le doigt sur la gâchette.
oh ! phrase en terrible chute qui annonce l’apparition de l’espion, du guetteur, va savoir….