Maintenant j’ai trois photos de toi, trois clichés qui ne sont pas à moi, ils s’ajoutent aux quelques images qu’on peut trouver dans le grand album sans pages de la toile. Elles sont la promesse d’une nouvelle correspondance, toi qui as porté les miennes (celles des autres aussi, je le sais, c’est le hors champ de notre cadre) et qui me disais que l’attente en était une modalité nécessaire. Aujourd’hui l’attente est sans lendemain. Sur les trois photos tu regardes ailleurs, sans doute une femme, des formes mouvantes requièrent ton attention, peut-être aussi que tu poses le regard au dedans – toi, tu vois, toi à qui j’ai toujours dit vous et que j’ai construit dans cet ailleurs incertain qui aujourd’hui fond sur moi depuis l’intime du cadrage, des personnes qui t’accompagnent, depuis le geste de celle qui m’a confié de toi ces clichés, toi fantôme, toi présence, toi palimpseste de tous les personnages qui m’habitent – toi tu vois, j’approche ta vie qui n’est plus. Vertige à contretemps. Tu concentrais mes adresses ; la mort n’y a changé qu’un mot, ce restante qu’on appose à poste pour ne pas donner trop de certitude à la disparition des destinataires.