Puisque je suis malade, puisqu’il l’est aussi, puisque nous le sommes tous les deux et que je lui ai laissé ma chambre pour garder intact l’espace de mon fourbi d’écriture et autre dans le salon. Puisqu’il va et vient sans cesse, pour aller fumer des cigarettes ou revenir poser pour la unième fois la question dont je ne connais pas la réponse, puisque c’est ainsi, que de nouveau, j’ai peu de temps pour moi, puisque tout va plutôt mal dans l’ensemble, il me faut comme le naufragé à sa planche m’accrocher à mon clavier de salut que je retrouve bien sale, tout poisseux des repas expédiés en pianotant, dans cette course incessante où j’ai le sentiment de ne rien faire parce que je n’écris pas, je me saisis avec rage des interstices, je ferme les rideaux qui filtrent un jour opalin et réduisent la chaleur, je leur suis redevable à ces beaux draps de grand-mère.La lecture aléatoire a fait succéder Andréas Scholl à Duke Ellington, à peine si je le remarque, je n’écoute pas, je m’enveloppe d’un halo de musique, isoloir fragile face aux effractions, peut pas s’empêcher…vite retourner dans la cabane mentale faite d’air, de silence et de lettres. La porte du couloir est fermée mais le bureau est grand ouvert sur le salon qui est grand ouvert sur la cuisine, je rêve d’une vraie cabane. L’écran fait tout de même écran, séparation physique et mentale entre le reste du monde et ces brefs instants où la douleur, les souvenirs, les joies, les colères viennent se déposer en mots, papillons légers et fragiles que nul ne verra peut-être, mais qu’importe, ils sont passés !
Texte poignant, merci ! « m’accrocher à mon clavier de salut », c’est exactement cela.
Merci Anne, on s’accroche, on s’accroche!
« vite retourner dans la cabane mentale faite d’air, de silence et de lettres. » et le texte est beau et fort et bien là : Lumières en mots
Coucou Nathalie, merci, je pédale fort pour rattraper le retard et puis aller vite te lire…