#anthologie #08 | avec vue

Le bain fauve de lumière matinale arrive par l’est de la ville. Le feuillage s’est doré sur la partie du houpier qui la rencontre. Moi, encore dans un lit sans chambre, déplié à proximité de la table de cuisine entre des étagères de livres et le meuble de télévision. Je suis sortie sur le perron. Je suis sortie du lit et j’ai ouvert la porte-fenêtre sur le concert de silence, quelques trilles et un roucoulement de tourterelles avaient l’étendue pour eux seuls. Les odeurs de feuilles et du fouillis de verdure de la cour remontent. Un train de cumulus blancs détachés en petits blocs de mousse progresse dans la direction du soleil, rosé sur le flanc éclairé, encore gris dans l’ombre. La cour entourée de silence, du roucoulement de la tourterelle, ouvre sur une autre cour plus grande entourée de bâtiments agricoles. Crois-tu ? J’y suis à l’abri, préoccupée par les règles d’un jeu interminable où se louent des chambres d’hôtel et se déroulent des incidents à résoudre. Le scénario cumule les imbroglios. D’une pièce on passe dans la suivante à la faveur de l’envie. S’ennuyer fait peur, les hautes armoires en bois se dressent telles des coffres austères sans promesse. Entre le travail du champ et la rigueur de la maison, la permission totale du jeu d’enfant. Il sait que le temps est venu de remercier cette grande vacance. La porte-fenêtre ouvre sur ce bain de lumière au fond des jardins, je passe d’une cour à l’autre. Je sortirai dans le monde par l’écran des informations, par le passage du couloir, du patio puis du hall. Sur la place, les employés installent les stands pour le marché. Les étalages de provisions, de légumes, de fruits, de vêtements, d’ustensiles de cuisine, de téléphone portable portent les conversations. La routine animée et joviale des stands serrés les uns contre les autres offre son précipité d’agitation. Il y a soudain la question de sentir dans les rues de la ville, de libérer les sens entourés de bitume, d’immeubles et d’axes de circulation. Il y a la question de jouer à vivre, prendre la vie comme un fleuve. Il y a quelques jours en Isère une rivière en crue ravage le village. Je circule à vélo. Je parle trop des problèmes ambiants. J’ai rempli mon panier. Je prends le RER, le tramway et le bus. Je change de quartier. Les espaces sont fragiles.

A propos de Nolwenn Euzen

blog le carnet des ateliers amatrice de randonnée (pédestre et cycliste) et d'écriture, j'ai proposé des séjours d'écriture croisant la marche et l'écriture, et des ateliers deux livres papiers et un au format numérique "Babel tango", Editions Tarmac "Cours ton calibre", Editions Qazaq "Présente", Editions L'idée bleue revues La moitié du Fourbi, Sarrasine, A la dérive, Contre-allée, Neige d'août, Dans la lune...

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