#anthologie #07 | qibla

qibla de l’arabe قبلة qibla « direction » pour désigner l’orientation cardinale de mes écrits. qibla c’est-à-dire en direction des montagnes des Alpes à moins de cinquante kilomètres et à vol d’oiseau à portée de main. à l’est elles tiennent solides et massives un horizon barré de sommets et pour peu que le store soit ouvert – en fin de journée il l’est – mon regard tire en oblique et observe ce théâtre de lumières et de couleurs changeantes directement à l’opposé du couchant. la maison étant orientée plein sud et mon bureau installé à 45 degrés du mur au sud la fenêtre de biais indique aussi au-delà de la chaîne des Alpes la direction de La Mecque. les montagnes leurs pentes et leurs sommets se blottissent dans une sorte de nid en corbeille entouré par un ensemble d’immeubles et de quelques maisons individuelles avec jardins arborés. c’est dire que je ne vois pas tout pour ne pas dire qu’une infime partie de ce paysage géologique. à l’heure où j’écris le soleil pense à se coucher envoyant sur les anfractuosités des teintes de soierie d’abord nacrée puis moirée de rose intensifiant le bleu neigeux accentuant les reliefs jouant sur les arêtes à la manière d’un kaléidoscope d’une géode de cristal. il suffit de baisser les yeux sur les pages noircies de lignes pour ne plus retrouver en les relevant ce qui à l’instant formait tableau les roches couvrant leurs épaules en un geste pudique d’un velours pourpre venant recouvrir ce qui tout à l’heure sera endormi et roide tout recouvert de cendres grises la scène à peine éclairée d’un pâle clair de lune laissant danser les dernières ombres

A propos de Cécile Marmonnier

Elle s’appelle Sotta, Cécile Sotta. Elle a surtout vécu à Lyon. Elle a été ou aurait voulu être marchande de bonbons, pompier, dame-pipi, archéologue, cantinière, professeure de lettres certifiée. Maintenant elle est mouette et fermière. En vrai elle n’est pas ici elle est là-bas. Elle s’entoure de beaucoup de livres et les transporte avec elle dans un sac. Parfois dans un carton quand il ne pleut pas. Elle n’a pas assez d’oreilles pour les langues étrangères ni de mémoire sur son disque dur. Alors elle écrit. Sur des cahiers sur des carnets sur des bouts de papier en nombre. Et elle anime des ateliers d’écriture pour ne pas oublier de vivre ni d'écrire.

6 commentaires à propos de “#anthologie #07 | qibla”

  1. Mesure du temps de l’écriture au changement de la lumière qui transforme le paysage, c’est réussi !
    Merci

  2. J’aime beaucoup ce déploiement des points cardinaux, le guet, l’effort de tirer vers le sud, et l’est comme une obsession, surtout l’idée d’envisager comme vue d’oiseau, ou d’avion, ce qui pourrait se faire écho, un travail d’ondes loin au-dessus… et pour finir, cette vue en plongée sur la page… qui relance la création
    Bravo Cécile !!