Tenir quelque part sur la terre. J’ai l’impression que tenir s’emploie pour défendre une place forte. J’ai du mal à identifier si la terre est du côté de l’abri ou de l’assaillant.
Je ne veux pas tenir. Souvent je nage dans mes lieux plutôt que je les habite. Je respire une fois sur deux. Je me déplace d’un bord à l’autre.
J’habite d’abord un paysage. C’est tout ce qu’il me reste de liens plus anciens qui n’ont pas tout à fait existé. Ou à l’inverse à l’excès. Quand les liens serrent fort les maisons épaississent comme des draps.
Habiter en été pendant l’hiver. Dans la région tempérée.
Dans le récit familial, l’hiver en Creuse c’est le lieu âpre, d’où l’on respecte.
Habiter comme lutter contre une étrange mélancolie de la « maison bleue ». Adossée à la colline. On y vient à pied. On y frappe pas. On a jeté la clé.
J’ai passé des années devant le portail d’un homme vouté au bâton qui rentre chez lui. Les couleurs de la toile de Gauguin à côté de l’ecran de télé.
On habite dans l’idée plutôt un village qu’une maison ou une pièce. Plutôt une région lointaine que tout près. Dans la réalité chez soi on ne sait pas bien où c’est profondément.
Se tenir quelque part sur la terre. Je pense que parler des lieux qu’on aime, comme cherche à l’apprecier Joëlle Zask, est aussi difficile qu’habiter les lieux qu’on aime.
J’avais oublié que plusieurs villages de la vallée de la Dordogne avaient été engloutis ou submergés, les familles déplacées, en raison de la construction de cinq barrages hydroélectriques entre 1932 et 1957. Le 22 juillet, chaque année, les habitants se réunissent à la mémoire de deux villages disparus.
Les militants sont montés habiter dans les arbres où ils avaient construit préalablement des cabanes. Leur occupation du sol ne pouvait plus être alors un motif d’évacuation. Dans le dernier roman que j’ai lu de Thomas Flahaut, « Camille s’en va ».
J’aime toutes ces manières d’habiter ! Ah la « maison bleue »… J’aime aussi aprrendre des choses, comme l »histoire de ces villages engloutis de la vallée de la Dordogne. Merci !
Merci d’être passée Isabelle ! Je découvre votre blog avec grand plaisir. Et quelques points en commun : les nuages, Douarnenez… A très bientôt vous lire.
« Tenir quelque part sur la terre. J’ai l’impression que tenir s’emploie pour défendre une place forte. J’ai du mal à identifier si la terre est du côté de l’abri ou de l’assaillant.
Je ne veux pas tenir. Souvent je nage dans mes lieux plutôt que je les habite. Je respire une fois sur deux. Je me déplace d’un bord à l’autre. »
J’aime beaucoup ces textes et l’expression tenir sur la terre. C’est très fort.
Merci Nolween, à bientôt.
Merci beaucoup Clarence. Dans ce texte de carnet j’intègre des lectures. « se tenir quelque part sur la terre » est le titre d’un essai de sociologie de Joelle Zask paru aux éditions Terre urbaine.
« Se tenir quelque part sur la terre » c’est tout sauf la stabilité… entre les différents fragments du texte, âpres et beaux, j’ai eu l’impression de tanguer. Étonnant que d’une telle sobriété naissent tant d’images. Merci Nolwenn
Merci Muriel ! Parvenir à une certaine densité m’importait, avec ces fragments. A bientôt vous lire.
La profondeur de ce texte s’imprègne en nous comme la vérité. Merci, Nolwenn !
Merci d’être passée lire Héléna. Je passerai à mon tour. Vérité ? il faudra des contre-marches et alternances !
« Quand les liens serrent fort les maisons épaississent comme des draps. » qu’elle image forte ! et tenir ( comment ) et quoi qui tient qui … Merci
Merci pour ce retour Nathalie. Grand plaisir à te lire à mon tour. (Je ne laisse pas toujours de commentaire quand le temps manque.)