#anthologie #03 sac à dos

J’ai un sac à dos, un sac à dos de marque Quechua, un choix qui s’est imposé à moi. Ce sac à dos est très laid, en toile synthétique gris-bleu et des fermetures jaune anis pisseux. Il ne m’a pas coûté cher, 20 euros, je crois. C’est le genre de sac à dos hideux qui ne disparaît jamais, alors que je voudrais tant qu’il soit autre. Je voudrais qu’il soit élégant et pratique. Pas ce Quechua un peu plouc, un peu randonneur du dimanche, avec ses poches multiples ridicules, ses points de fixage inutiles. Mais voilà, ce sac à dos s’est imposé à moi parce qu’il est toujours là, toujours disponible, modeste, souple, increvable.

Dans ce sac à dos, je mets mon ordinateur, protégé par une pochette elle aussi très moche, d’un rose layette douteux. J’ai honte de ce choix, vestige d’une époque où j’avais une passion pour le rose pâle, une passion que je n’assume plus aujourd’hui. Pourtant, cette pochette est pratique, épaisse et protège bien mon ordinateur, qui probablement le bien le plus précieux que je possède.

Mon sac à dos a cette dimension particulière qui permet d’y glisser un ordinateur de 17 pouces, soit environ 43 cm de diagonale. La plupart des sacs à dos sont soit trop petits, soit trop grands. Mais ce sac à dos, malgré sa laideur, a la taille parfaite. Il est conforme aux exigences des bagages à main chez EasyJet, ce qui est une considération importante.

Adieu, donc, le joli sac messager Freitag, pièce unique à 350 euros, le Samsonite de la femme chic et moderne ou le Eastpak de la collégienne attardée. Moi, je me promène avec mon sac à dos Quechua, honteuse de son apparence dans des endroits où il ne se sent pas plus à sa place que moi. Une business school, une fondation d’art contemporain, un bar d’hôtel bohème. Je le planque, je ne l’assume pas. Pourtant, je dois reconnaître que je n’ai pas trouvé mieux. Je cherche, je regarde les sites internet, les magasins de maroquinerie, mais aucun sac ne me va.

Un sac à dos qui m’irait comme un gant, qu’est-ce que ce serait ? Un sac à dos de dimensions justes, je ne peux pas dire mieux. Juste. Ni trop grand, ni trop petit, avec de l’espace, car j’ai besoin d’espace. Un sac à dos en toile imperméabilisée ou en cuir léger, peut-être même une imitation cuir de bonne qualité, ou une matière plastique douce au toucher, compacte, dense, poudreuse. Il faudrait des poches, mais pas trop, pour ne pas passer pour un genre de fille geek no life. Une fermeture par en haut, soit en roulant le haut du sac, soit par une simple fermeture éclair. Des bretelles réglables, confortables, sans ces bouts qui traînent partout. Et pas de ceinture ventrale, bon dieu. À l’intérieur, une poche pour l’ordinateur, une autre pour des objets précieux comme une carte ou des clés. Sur les côtés, un espace pour une bouteille d’eau. Pas de porte-stylo, pas d’accroches inutiles pour piolet ou boussole. Une poche sur le dessus du sac pour un livre, une pomme, un mouchoir, une casquette, ou un vêtement de pluie roulé en boule qui sert d’oreiller d’appoint pour les voyages en train.

A propos de Geneviève Flaven

Je suis née à Paris en 1969. En 2001 à Nice, j’ai fondé une agence de conseil en design puis suis partie à Shanghai pour développer mes activités. Le départ en Chine m’a mené vers l’écriture et la publication. Depuis mon retour en France en 2019, je me consacre à la création et à l’animation de projets collaboratifs de théâtre documentaire. Théâtre : The 99 project (http://www.the99project.net/ ) Blog : Shanghai confidential (https://shanghaiconfidential.wordpress.com/)

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