#Nouvelles Boucle 2#03 Familles je vous sais

Les Batowski caractéristiques de ces familles fondées par des immigrés de Pologne, attachés à s’intégrer au plus vite à la nation française. J’ai déjà évoqué le père, Zbigniew. Ses hauts faits de résistance, son mariage avec Marie-Jeanne, ont favorisé sa carrière chez Maison, sa reconversion vers la viticulture. On avait oublié leur origine, le prénom bizarre. Les enfants étaient scolarisés, studieux. Marie-Jeanne participait aux travaux viticoles à l’égal de son mari, et bientôt de ses fils, tous courbés ensemble sur leur raclotte ou leur sécateur, côtoyant les vignerons du pays. J’ai peut-être déjà parlé des jumeaux Batowski dont Yanouch était un footballeur prometteur. Gaucher, jouant ailier dans l’équipe locale, il est repéré par l’entraîneur du club, M. Fourest, percepteur du village qui a des relations dans le monde sportif. Il l’envoie en stage au FC Sochaux avec l’accord de la famille B.. Yanouch devient professionnel, recruté à Sedan, fera carrière au côté de Zaccharie Noah, il me faudra aussi parler de cette famille immigrée au destin bien différent de celui des Batowski. Le jumeau Kristian, lui, devient une sorte d’historien du vin de Champagne et de la lutte des vignerons Aubois pour être reconnus. Il collabore aux travaux érudits de Gilles François, famille dont les Batowski sont amis. On se reçoit autour d’un verre, on vendange ensemble. Le père B. échange quelques mots en polonais avec Jeanne François dont le grand-père venait de Gdansk.

Les Fourest. viennent du sud-ouest, arrivés en Champagne au hasard des mutations administratives. Au village des Riceys, André Fourest a deux passions, son travail à la perception lui laisse quelques loisirs. Il s’agit du football, comme nous l’avons dit précédemment, et du tarot, qu’il pratique au café Bonnet, avec ses partenaires Pierre Brinot (pharmacien), Jean Simonot (cordonnier, dit « Le Bouif ») et Raoul Lecomte (tapissier, bourrelier). L’été, une petite foule entoure la table des joueurs, des paris s’organisent parallèlement aux mises des joueurs. Dans le village, le prestige d’un bon taroteur rejaillit sur sa famille tout entière, tout comme le backgammon structure, ailleurs, certains villages ruraux. Jacques Marigar, fils de Suzanne, lorsqu’il passe des vacances au village se joint parfois au groupe ; il fait le quatrième ou parfois le cinquième pour une variante du jeu. Avec André Fourest, Jean Brinot et Maurice Larose, le médecin, il joue au bridge. André Fourest tient les comptes des gains de chacun, une petite cagnotte est constituée, elle sera dépensée au restaurant, les épouses sont invitées, les familles resserrent leurs liens qu’elles prolongent à Paris au retour des vacances. L’ainé des garçons Fourest, Christian, excellent footballeur, est arrière central du Paris Université Club, tout en poursuivant ses études de pharmacie. Le père F., muté à Paris, devient président du PUC. Cependant, il ne peut faire adhérer au club universitaire son fils cadet, Michel, sportif très motivé, mais incapable d’obtenir son bachot. Je parlerai plus loin de ce garçon, rebelle à l’enseignement, qui fera une carrière fulgurante aux Etats Unis dans le secteur de la restauration. La fille Fourest, France, suit l’école Normale de Troyes, poussée par la famille vers la sécurité de la fonction publique. Nommée aux Riceys (10340), effectue son stage, trouve un logement chez Suzanne Marigar, directrice de l’école de filles. Au bout de quelques années, elle se marie et laisse tomber l’Education Nationale.

Les Brinot sont très différents des Fourest. Mises à part les parties de bridge hebdomadaires qui les réunissent « à armes égales » Jean Brinot apparaît comme une sorte de bienfaiteur pour la famille Fourest. Christian, dont j’ai parlé plus haut, ayant échoué en Pharmacie est embauché comme simple préparateur à la pharmacie Brinot puis au laboratoire d’analyses créé par Jean. J’ai déjà parlé du fils cadet, Michel. Son chemin dans la vie semblait compromis par ses échecs successifs au baccalauréat, il apparaît comme le cancre de la famille que va aider Jean Brinot. Il lui fait rencontrer le chef barman de l’hôtel Georges V. qui le prend sous son aile. Très vite, Michel montre des qualités relationnelles et créatives telles qu’il devient premier barman, gagne un concours national, est envoyé aux Etats Unis. Repéré dans ses fonctions par un metteur en scène de cinéma, il fait quelques bouts d’essais, puis, déçu (ou décevant ?), décide d’ouvrir un restaurant français à Washington. Aidé par la filiale du Crédit Lyonnais, l’affaire est un plein succès, elle permet à Michel Fourest de créer des succursales de sa première affaire. Après son divorce, nostalgique de la France, il se retire dans son village de naissance. Les Brinot ont eu une fille, médecin et un fils entrepreneur, grand ami de Jean Marigar avec qui il partage la passion de la pêche à la truite.

Les Marigar croisent les Batowski, les Fourest et les Brinot dans le village des Riceys (10340). Les parcours de Jacques Marigar et André Fourest sont assez proches ; issus l’un comme l’autre de générations de paysans, ils ont suivi des études, passé des concours, fondé une famille, mené quarante années de carrières, l’un dans l’industrie, l’autre dans l’administration,. Jacques Marigar, cependant, à la demande de son entreprise, a dû s’expatrier en Allemagne tout d’abord, puis aux Etats-Unis. Dans ces circonstances, la famille s’est trouvée coupée en deux, la mère et la cadette suivant les parents tandis que les deux ainés restaient à Paris où ils suivaient leurs études.

Je voudrais maintenant vous parler des Noah, famille immigrée du Cameroun. Jean Marigar, lorsqu’il suivait ses études secondaires au lycée de St Germain en Laye, côtoyait Zaccharie Noah dont le prestige auprès des élèves était considérable, non pas en tant qu’élève surdoué, qu’il était peut-être, mais comme footballeur. Aux récréations, Zach s’entraînait avec une capsule de bière percée d’un trou par lequel passaient trois rubans. Ce volant une fois projeté en l’air par un copain, il ne touchait plus le sol, Zach le «reprenait» d’un coup de pied, le manège durait, durait jusqu’à la rentrée en classe ; ses coups de chaussure étaient scandés par le cercle des admirateurs qui comptaient en tapant dans leurs mains. Zach, toujours en costume impeccable, frappait le petit volant avec élégance, abandon, presqu’indifférence. Devenu professionnel à Sedan, il fut l’équipier de Yanouch Batowski, il est retourné au Cameroun où il est enterré, il est le père et le grand-père de sportifs devenus plus célèbres que lui.

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