#enfances #05 | Merveilles

Le ventre nacré de la truite fariot qui frémit sous les doigts de mon père.

Les moirures des ailes de papillon, leurs ocelles.

Les illustrations au pastel brumeux des Contes chinois des éditions Gründ. Une montagne, une pivoine palpitent.

La première fois qu’on distingue la structure d’un flocon de neige. C’est de la géométrie.

Le brasier lumineux qui s’empare des carreaux orangés de la porte de la cuisine comme une venue au monde.

Les bans de coquillages échoués sur les plages de Bretagne. Accumulation du petit.

Les premières lettres qu’on déchiffre sur les affiches publicitaires. La structure en pyramide barrée du A majuscule.

Le prodige de l’arc en ciel qui s’élance. Matériel, immatériel.

Les mots de Jean Tardieu qui roulent dans la bouche à la maternelle : Comment ça va sur la terre ?

Les mots d’Hugo et Rimbaud en primaire qui projettent hors corps. Les mots sont matière.

La magie du torrent où nous construisons des barrages chaque semaine, mains gelées.

Les étoiles de mer collées au mur de clôture en Vendée. Jeu entre l’animé, l’inanimé.

La collection de pierres qui scintille dans sa boîte de plastique transparente. Elles reposent une à une sur leur lit de coton.

L’habit de majorette rouge et blanc, le bâton qui attend et dont je ne saurai jamais me servir.

A propos de Stéphanie Buttay

L'écriture accompagne depuis toujours ma pratique du dessin et de la couture. Voire, elle les précède : création de livres d'artistes notamment avec l'ami poète Werner Lambersy. Représentée au Musée de la création Franche à Bègles et au Prieuré Saint Cosme pour le Livre pauvre, j'ai publié aux éditions du Carnet du dessert de lune et dans la revue Cabaret.

6 commentaires à propos de “#enfances #05 | Merveilles”

  1. « … Les mots sont matière. » moirures,ocelles, flocon, torrent, clôture, bâton… et cette première lettre en majuscule . Merci Stéphanie

  2. je retiens dans ce monde l’émerveillement de la découverte des lettres, de leur agencement et de la lecture
    une histoire de mots bien sûr
    merci Stéphanie pour cette rencontre

    • Oui, c’est un peu le déchiffrement du monde. J’aime beaucoup ces traits de blanc qui traversent vos images de mer, une mer englobante. Bonne journée Françoise !