Il ne s’était perdu qu’une fois, enfin pas tout à fait, et cette errance il l’a sûrement déjà raconté, il va radoter, redire ce qui déjà a été dit, gratter la croûte, refaire sortir le sang, mais à cette époque un peu de mercure au chrome suffisait à asséché la petite plaie. Il va raconter son enfance, il va rejouer le film, mais il se méfie des souvenirs, ils ne sont pas toujours au rendez-vous, et puis avec le temps il a croisé suffisamment « d’anciens combattants de leur propre vie » rejouant le même disque rayé, le même vieux morceau suranné de leur passé, alors il essaie d’éviter le bourbier plein de mélasse et de confiture, mais il est joueur, alors il joue, la confiture quel parfum?
Il marche dans les bois, accompagné des siens, le soleil crée des ombres avec les branches des arbres sur le chemin sec, les feuilles sont ternes et racornies, toutes semblables avec leur teinte grisâtre.
Il avance, il a envie d’indépendance, d’aventure, et près d’eux il ne risque rien. Il suit la grande allée, ils l’appellent pour retourner à la voiture, il répond qu’il arrive, mais il continue d’avancer, quelques instants plus tard, il décide de revenir sur ses pas, il se retourne et il se trouve face à trois allées identiques, il ne sait pas d’où il vient. Il hésite, puis il choisit une allée, il avance en observant les arbustes, les arbres, espérant reconnaître une forme, une ombre, une trace. Quand un peu plus tôt, il marchait, il n’observait rien, il attendait un rêve, un pirate ou une fée, un ours gentil ou un grand cerf à la barbe blanche, les arbres ne formaient qu’un décor pour son imagination. Perdu dans ce décor qui est devenu une vraie forêt, un lieu un peu inquiétant, il sent son cœur battre un peu plus vite, il accélère son pas, puis il prend conscience qu’il s’éloigne du seul point qu’il connaisse, le carrefour des trois allées; il fait demi-tour, mais il ne retrouve pas le carrefour, maintenant il a peur, il ne pleure pas, il décide d’avancer droit devant lui. Il arrive sur une route, il continue un peu, et puis il voit une station-service, il entre, il explique à l’homme qui est derrière la caisse qu’il s’est perdu dans la forêt. L’homme le fait s’asseoir à côté de lui, il appelle les gendarmes. Le gendarme lui demande s’il serait capable de reconnaître l’endroit d’où il venait, il dit: oui. Ils partent, après quelques minutes, il reconnaît la zone de pique-nique, sa famille est là. Tout le monde s’étonne de le voir arriver entouré de quelques gendarmes.
Le pot de confiture est fini, il faut faire attention avec le sucre, ça peut être un poison:
l’excès de sucre, et notamment de boissons sucrées, augmente le risque de carie dentaire, de surpoids et d’obésité. L’abus de sucre serait aussi associé à une augmentation du risque de diabète de type 2 et de maladies cardiovasculaires.
la confiture, ça dégouline
ce que j’ai aimé, c’est la manière dont tu as rendu compte du rapport au temps, celui de la peur d’un côté, celui de la joie de l’autre, la famille rassemblée autour de la confiture, « Tout le monde s’étonne de le voir arriver entouré de quelques gendarmes. »
Personne dès lors ne peut comprendre la peur