J’aime par dessus tout quand mon humeur rétive se laisse finalement porter, border, embarquer et que s’offre la scène, pour ensuite écrire — comme un souvenir — une fiction nouvelle.
La consigne entrevue hier, juste le titre et l’image figée, ne m’attire pas, je l’ai déjà faite non ? Et même deux fois. Pour m’en convaincre je me concentre sur le souvenir de ces deux fois.
La première c’était en 2018, 45 fois la Ville, mon premier atelier, dans une consigne assez avancée du cycle, cette ville que nous parcourions, que nous avions survolée, dont nous avions regardé les intérieurs, détaillé les lisières, que nous avions visitée avec les morts, décrite à reculons, depuis le ciel, depuis le sol, depuis derrière nous, il fallait cette fois en partir, sur quatre route aux quatre points cardinaux, j’étais si bloquée par le fait réel de cette ville dont on sort par trois directions pas vraiment franche et que pour la quatrième — vers l’ouest — la sortie manque vraiment, que je me souviens de l’état d’écrire, à inventer des tunnels qui n’existaient pas pour des trains qui ne passeraient jamais, avec un sentiment d’absurdité de ce texte, de sa lourdeur, du manque total d’intérêt qu’il représentait sauf à me faire comprendre une ville que je connais par coeur à travers un manque dont je n’avais pas conscience, qui en changeait vraiment sa nature. C’est une autre histoire.
La seconde, il y a trois été en comptant celui-ci, quatre gares, comme Cendras déjà. Pour moi cette consigne est magnifiquement traitées aux quatre bouches de métros de Belleville visitées par Philippe Berger, je le salue s’il nous suit de loin comme je l’espère. Je visite quand à moi, cet été-là et par google street, les quatre terminus des deux lignes de métro du Caire, et… surprise, ce sont les quatre mêmes bâtiments, seuls changent les environnements, les décorations, les ambiances, je m’attèle alors à ces quatre mondes au quatre coins de la ville, que l’on découvre en débouchant de quatre mêmes portes à colonnes.
La troisième sera donc cette année, car j’écoute ce matin la consigne tout en roulant — c’est l’écoute que je préfère, je suis seule, je conduis, le son m’entoure, je me déplace, mon esprit vagabonde, ce que j’entends semble se plaquer sur le paysage que je connais par cœur entre Villefranche et Lyon, qui croise la Saône à la hauteur d’une large courbe et d’une île allongée, longe les collines du mont Thou, surplombe Lissieu d’où j’envoie un clin d’œil à Danielle Godart-Livet et enfin accède en descente à l’entrée de la ville, dans le dur de la circulation — je vois en un flash où je vais poser mes personnages, elles seront dans le texte en cours, elles seront ensemble, ma narratrice et son double, il pleuvra, ce sera fin octobre, la première pluie sur l’Egypte du Delta.
J’aime beaucoup ces réflexions, ce récit de ce par quoi tu passes à partir du moment où tu découvres la consigne… Et ce souvenir ici de consignes passées et de ce que tu as traversé écrivant, et de ce que tu as écrit… La force de tout ça, la réalité rendue de ces affrontements (?) ou de ces confrontations plutôt avec la consigne.
Je suis tentée de parler de la matérialité du langage, de l’écriture qui en ressort. Et est-ce de s’être confrontée à ce traitement d’ecartèlement par les points cardinaux ou, moins dramatique, ce repérage depuis l’horizon qui construit l’espace, l’ouvre ?
Les textes dont tu parles sont ici quelque part ?
« Je visite quand à moi, cet été-là et par google street, les quatre terminus des deux lignes de métro du Caire, et… surprise, ce sont les quatre mêmes bâtiments, seuls changent les environnements, les décorations, les ambiances, je m’attèle alors à ces quatre mondes au quatre coins de la ville, que l’on découvre en débouchant de quatre mêmes portes à colonnes. »
Tu as découvert tout ça sur Google street ?