Sa vie parmi les livres est d’une richesse incommensurable. Très tôt, ses curiosités plurielles l’amenèrent à travailler en profondeur les écritures d’incontournables auteurs francophones et anglophones, des plus anciens aux plus contemporains. Tenter l’archéologie de ses lectures exigerait plus de vies que les chats n’en possèdent. Par contre, les preuves indiscutables que nous avons pu recueillir à son insu concernant les premiers moments de sa vie avec un livre permettent de comprendre l’une des particularités de cet immense lecteur vis à vis de la gente féline. Sans que l’on puisse savoir qui en est responsable, il est établi que son apprentissage a commencé avec le nouvel alphabet en images de Madame Doudet (1833-1904). Ce manuel d’enseignement primaire a été publié en 1874 par Théodore Lefèvre, libraire-éditeur parisien, sous le titre Bébé saura bientôt lire. Sans jeter la pierre à la femme de son temps que fut Madame Doudet, la lecture attentive des textes qu’elle soumet aux yeux de ces très jeunes enfants relèvent d’une étroite vision binaire du monde qui n’épargne ni la nature, ni les rapports humains. Quels terribles et profonds formatages des esprits suivirent-ils la découverte de ces premières lectures ? — Je n’aime pas les chats,ils ressemblent un peu au tigre, et le tigre me fait peur. Il a l’air sournois; quand il passe sa langue rugueuse sur ses lèvres, on dirait qu’il y sent encore le sang de sa dernière victime. — Quand je serai grand, je ferai des voyages comme mon oncle; il me donnera sa belle carabine, et j’irai à la chasse aux tigres et aux panthères; ce sont de méchantes bêtes et, quoi que tu en dises, je trouve qu’elles ont l’air faux. Heureusement pour nous et pour lui, notre lecteur immense ne s’est pas perdu dans la chasse aux fauves. Il craint simplement les chats, ne supporte pas leurs images, évite leur contact. Comme si une voix binaire résonne toujours, encore et encore : le chien est un bon animal.
NDA: Toute ressemblance avec des faits et des personnages existants ou ayant existé serait purement fortuite et ne pourrait être que le fruit d’une pure coïncidence
décidément je l’aime (bon là paresseusement je ne me risque pas à dire ce que j’aime dans l’écriture de ce petit texte, j’en reste à cette vérité « je n’alme pas les chants (mais n’ai pas de goût pour la chasse, contrairement à eux d’ailleurs)
Décidément je vous adore Brigitte. Pour écrire « bon là paresseusement » et pour ce merveilleux lapsus « chants-chats ». Et comme vous : pas de goût pour la chasse. Miaouuu !
Fiction ou réalité, c’est un texte délicieux à lire !