#été 2023#09#l’école

Les enfants partaient ensemble vers l’école primaire. Depuis l’immeuble, ils suivaient le bord du trottoir avec leurs cartables sur le dos et descendaient un sentier tracé à travers le terrain vague pour rejoindre la rue qui menaient à l’école des filles puis plus loin à l’école des garçons. Le matin, elle se préparait rapidement et quand démarrait la cavalcade bruyante dans les étages du dessus, sa mère lui ouvrait la porte d’entrée et lui déposait une bise sur le sommet du crâne. Elle ne l’accompagnait pas jusqu’à l’école et n’allait pas la chercher après la classe. Les autres mamans ne le faisaient pas non plus. Aujourd’hui, elles attendraient toutes devant la barrière métallique protégeant le portail du périmètre scolaire en observant attentivement les passants pour détecter les mauvaises intentions. 

Un jour, elle a juste eu le temps de mettre ses chaussures sans enfiler ses socquettes. Elle les avait dans la main et arrivée à l’école, elle s’est assise par terre pour ôter ses sandalettes et les mettre. Les autres fillettes se sont moquées d’elle et pendant plusieurs jours elle a fait le même cauchemar où elle s’asseyait pour enfiler les socquettes. Invariablement, les autres riaient. 

C’était une école avec une cour complètement fermée des quatre côtés : une fois passée la voute du portail, sur la gauche au rez-de-chaussée les classes de CP, CE1 et CE2. à l’étage le bureau de la directrice, les CM1 et les CM2. A droite les toilettes avec des portes qui fermaient de l’extérieur. Le gage d’amitié était de trouver une volontaire qui accepte de tenir la porte fermée quand on était à l’intérieur de ce lieu. Lorsque l’école est devenue mixte, il est apparu nécessaire de fermer ces portes de l’intérieur. 

Au fond de la cour, la grande salle qui servait pour le spectacle de fin d’année, la cantine et la cuisine, domaine de la cantinière. La cantine était petite, la plupart des enfants rentraient manger à la maison le midi. Aujourd’hui, presque tous les enfants mangent à la cantine et la cuisine centrale privée mandatée par la mairie livre des plats à réchauffer dans de grandes gamelles en métal.

Un préau recouvrait tous les côtés et laissait dégagée la cour de récréation. Le revêtement en goudron de la cour était uniquement décoré par les bandes blanches qui permettaient aux élèves de se mettre en rang devant leurs classes pour celles du rez-de-chaussée. Pour jouer à la marelle, il fallait attendre de rentrer chez soi le soir et tracer les lignes avec les craies sur l’asphalte devant l’immeuble. Pour jongler avec les balles aussi, il fallait utiliser le mur de l’immeuble. Les jeux de récréation autorisés ne devaient pas salir les bâtiments. Il restait l’élastique, la corde à sauter et chat. La cour de récréation était immense, les courses poursuites à travers l’espace clos étaient épuisantes. 

Des années plus tard elle a aperçue à travers le portail, exceptionnellement grand ouvert, l’intérieur de l’école. Ce n’était plus la même cour, celle-ci était minuscule, elle pouvait la franchir en quelques pas. Et le préau, elle aurait pu le toucher rien qu’en levant le bras. Elle n’a pas oser aller plus loin préférant garder son souvenir d’un grand espace.  

A propos de Noëlle Baillon-Bachoc

Lectrice compulsive, attirée depuis le plus jeune âge par la littérature de l’imaginaire avec une prédilection pour le fantastique. Je me consacre à présent totalement à l’écriture. J’anime des ateliers d’écriture et des stages dédiées à la littérature de l’imaginaire.