#été2023 #01 | non, mais qu’est-ce que c’est

le texte a été repris(é) mardi soir assez tard - j'ai cru comprendre (mais comme on verra, je peux me tromper) que l'affaire ici présente se déroul(er)ait en deux temps la semaine - j'ai pris quelque devant

ici le signet (mais non, ce n’est pas Capo di Monte)

je vais tenter de me souvenir des divers lieux et places où il s’était installé pour voir écouter complimenter l’armée – il avait été à l’armée, ça avait été un fiasco mais qu’est-ce que ça peut bien faire ? Il en était arrivé à devenir quelqu’un d’autre, on l’avait nommé consul ou plénipotentiaire ou encore ambassadeur – il y a quelque chose qui en rappelle un autre, une belle guerre ah ça oui ! mais un autre qui, comme lui, usait d’un pseudonyme et qui s’est suicidé rue du Bac, une balle dans la bouche dit la chronique – mais de la guerre nous n’en sommes que les jouets : il y a des jeunes gens qui s’en vont pour combattre on ne sait trop quel ectoplasme briseur de tours jumelles, ou affaiblir tel autre ou se battre avec on ne sait qui – ce genre de choses existe toujours – genre – un truc de mecs à n’en pas douter, mais ils en sont tous morts et c’est tant mieux – on meurt aussi de ce qu’on peut, assis à sa table, devant la mer ou dictant ses émois à quelque jeune étudiant.e relisant ensuite ces écrits c’était avant, bien avant – je ne sais dans quelles circonstances, il y avait hier une image de Capo di Monte

ce musée des hauts de Naples qui va fermer quelques années où une salle un peu cachée (à peine) montre les ébats érotiques des muses et autres (il n’y a pas de masculin à muse, tu as vu ?), le pont sur l’Arno (s’en aller tous les deux/dans le sud de l’Italie) et les sept collines dont l’Aventin – il y avait dans l’article vantant La Ciociara (Vittorio de Sica, 1960) les invectives de l’ordure envers ces films qui devraient plutôt (disait l’immonde – son surnom était il divo soit « le divin ») accompagner de façon positive le boom touristique de l’Italie – le tourisme, oui c’est ça, et aussi le voyage et ses carnets – mais je ne parviens pas à continuer, je regarde sa ville natale du côté des Alpes (j’y avais travaillé un moment, il y avait aussi là un type qui énonçait la nécessité de donner une prime à la vertu je me souviens) il me semble qu’il détestait Rome mais je peux me tromper on peut toujours se tromper – à son contraire, j’ai toujours aimé cette ville-là (ou alors c’est l’inverse, je ne sais plus) (non, c’est Venise, pour lui, pas moi – encore que je ne sache plus trop) – dernièrement attendant un bus qui devait aller sur les hauts de Trieste, un vieil homme parlait et disait « ah vous venez de Paris… Ah bien sûr que Paris est la plus belle ville du monde, bien sûr oui… après Rome naturellement » et de rire – naturellement – les gens avec qui on rit – il est descendu à l’arrêt de la plage, il allait bronzer, il avait un petit pliant, une bouteille d’eau et un chapeau en fausse paille, comme moi – et cette incise dans le livre « ce jour-là j’ai pleuré comme une femme… j’ai déjà vu un homme pleurer comme une femme, mais jamais une femme pleurer comme un homme » – je devrais peut-être mettre des italiques aux citations (je me souviens d’un film qui disait que les hommes de ma sorte pleuraient plus que les autres) (je pose sorte de préférence à genre) – je vais tenter de me souvenir, il y a sur le bureau des articles offerts, par exemple ce marque-ta-page qui recense les écrivains irlandais (ils sont douze et pas une femme), la petite fusée qui réplique celle de On a marché sur la Lune, la reproduction d’un petit cheval grec quelques effigies de lions et la tabatière de mon grand-père (je crois me souvenir qu’il aimait beaucoup son grand-père, mais je peux me tromper – mon analyste avait coutume de dire « les sentiments mentent » mais c’est faux, comme de dire que les souvenirs font de même, c’est une erreur – contrairement au cinéma, c’est en sortant qu’on paye la séance), quoi encore je ne sais plus, ah si assis devant l’ordinateur, un portable acheté au lendemain de l’incendie, il fonctionne toujours en ayant pris huit ans (mais on lui a changé son disque dur) (il faudrait parler de la musique, il faudrait parler de la gastronomie, du goût du piquant, le poivre le fromage le sel) – une tendinite au pouce droit à force de manier cette souris comme on l’appelle – Mickey aussi en était une ça doit venir de là – et puis des images, beaucoup d’images : j’ai manqué la dernière séance du séminaire parce que j’avais rendez-vous avec les auteurices (ce que c’est moche) parisien.nes (mais on fait comment sinon ?) et aussi parce que je devais partir – arrivée tard à la nuit tombée minuit – sans lumière les pissenlits avaient poussé, il ne pleuvait pas, là-bas la fenêtre est dans mon dos, ici à ma droite, c’est une baie – je ne vois rien de lui, c’est qu’il m’est trop éloigné, il ne me fait aucun doute qu’il s’agisse d’un homme et pourtant comme j’aime les femmes mais non, un homme sans doute mûr comme on dit d’un fruit bientôt blet, il me semble qu’il porte des favoris, très deuxième empire je suppose, ou alors seulement premier – il y a longtemps, je peux aller chercher une plaque à son effigie, son nom de plume, qui a été apposée au 61 de la rue du cardinal par un indigne ministère de culture et communication et médias – je peux essayer de retrouver ce qui a fait que l’un de ses livres m’est tombé des mains – il est mort d’apoplexie en sortant de chez je ne sais plus trop qui, dans cette rue derrière l’opéra comique ou lyrique ou quelque chose dans le coin (tu vois par exemple, c’est con hein, mais cet opéra est situé (comme on dit maintenant) sur une place Boieldieu, et moi, ça m’évoque Eric von Stroheim qui interpelle Pierre Fresnay dans cette Grande Illusion (Jean Renoir, 1937)) – parfois les livres tombent d’eux-mêmes – je peux essayer encore ça ne me sera de rien, il est sans doute dans les parages, les miens probablement, il n’y a guère de plaisir à parler de soi sinon une complaisance poisseuse : on dirait un rêve, mauvais, comme une sale humeur, je peux essayer de regarder mais il n’est pas là, il a été sauvé (je parle de l’exemplaire du livre que j’avais, dont le héros va à son rendez-vous vers cinq heures, il est à cheval, son habit de brocards et son chapeau de lieutenant, dans une forêt du côté du Jura ou des Vosges – tout cela est faux mais il s’agit de cette ambiance-là, pourtant : le cheval marche au pas (j’avais oublié de le mentionner : il faut du temps pour y arriver), les feuilles sont aux teintes d’automne, ces rouges, ces oranges, ces mauves et ces noirs qui vont à la pourriture – parce que romanesque est un adjectif apparenté à sentimental) – il a été sauvé je disais oui, mais il est là-bas c’est pour cela que je ne peux guère le consulter – mais j’ai autre chose ici que je vais photographier, c’est un bel apparentement et c’était dans un de ses guides qu’il écrivît, dit-on, sans y être vraiment, juste par des souvenirs et des informations glanées ici là et ailleurs avec l’aide d’un de ses amis – c’est l’un des signets (il en compte deux, l’un pour la page, l’autre pour les notes) il est dans les tons – c’est cet amour-là aussi – c’est cette façon de se souvenir de ce qu’on a aimé, celles et ceux tout autant tu sais bien, et d’ainsi leur donner quelque chose de nous – quand même ils auraient disparu de nos vies, leur faire encore une place et accueillir leurs fantômes sans doute

ici Sophia (De Sica disait qu’il avait réussi à ne la laisser se maquiller que les yeux) dans le rôle

(ol)oe

A propos de Piero Cohen-Hadria

(c'est plus facile avec les liens) la bio ça peut-être là : https://www.tierslivre.net/revue/spip.php?article625#nb10 et le site plutôt là : https://www.pendantleweekend.net/ les (*) réfèrent à des entrées (ou étiquettes) du blog pendant le week-end

17 commentaires à propos de “#été2023 #01 | non, mais qu’est-ce que c’est”

  1. j’avais lu un de tes textes à voix haute à Blanche, je n’avais pas réussi du tout, et/mais je m’étais bien amusé…et/mais elle avait bien aimé. Pourquoi ne l’ai-je pas refait? Je vais le refaire. Merci deux coups!

  2. Cher Piero, le masculin de muse est museau bien sûr ! (et même que ça se mange…) a-t-on déjà mange une muse ? merci pour cet oloe tourbillonnant et électrisant où je me perds un tantinet !

  3. J’ai, littéralement, manqué d’air – besoin de m’arrêter, j’étais perdu, je ne voyais plus où le texte menait – après On a marché sur la lune…
    Mais c’est sans doute normal : je crois comprendre qu’il faut une certaine pratique pour te suivre. Je vais respirer un peu et reviendrais te lire ! 🙂

  4. merci pour le passage matinal qui m’a propulsée, avant d’entamer les bidules du. jour ici, pour la saveur de chaque expression; de l’enchainement, des surprises qui sont des évidences, du fond ,bien entendu du fond, en résumé de votre écriture et de l’intelligence qu’elle charroie

  5. je suis passée – cet effect de lave énigmatique, conglomérat disparate qu’on ne peut pas suivre de a à z. Embêtée mais prise à défaut : pourquoi aller de a à z ? Alors j’ai mieux décompris.

  6. Je viens vous lire avec un peu de retard… désolée.
    J’aime beaucoup votre texte. On voyage, on passe de l’armée à la plage en passant par l’opéra.
    Les souvenirs, aussi.
    Et plutôt sympa le bureau, ce qui l’habite.
    Et ce « de la guerre nous n’en sommes que les jouets », j’adore.
    Merci.