27 septembre 2008
— Temps de l’écriture qu’on s’impose, qu’on devrait s’imposer avec encore plus de rigueur. Cet affrontement à la page papier ou écran. Qu’il est long ce cheminement et qu’est-ce qu’on tourne en rond !
— Tombé en un jour le Ghérasim Luca de Gallimard. Pour une fois, pas cette désolation qu’on ressent à glisser sur les mots comme hermétiques. « Glissez – glissez – à votre tour ».
Cet exemple un peu réducteur, plutôt l’impression de rebondir :
« Tout est foutu
touffu
fétu »
Exergue pour un polar :
« Tête tranchée
Tronc occulte »
Ça qu’on voudrait avoir écrit :
« Je te flore
tu me faune
(…)
Je te lune
Tu me nuage
(…)
Tu m’étoile filante
tu me volcanique »
— Croisé dans la rue aujourd’hui, un autre résonne au souvenir. Noter ça comme photo, sans développer roman. Les trois versions :
le vieux chien jaune
traîne sa chaîne
et son maître, vieux aussi
bâtard pelé jaune
en laisse
traîne son maître
vieux bâtard pelé jaune
traîne
sa chaîne et son maître
Il est fini quand un poème?
Soleil d’automne
les filles sur la terrasse
lisent
27 septembre 2014 (Nuit vers le 28)
— Cette inaptitude chronique à ne pouvoir écrire un de ces « bons vieux romans ». Reprendre le « Projet Robert 77 » ? Au risque de la formule ? Se résoudre au moindre. Se contenter de ces bouts de textes, infra-pochades pseudos oulipiennes. Comme à la radio, piocher dix mots au hasard du dico. Même pas envie cette fois d’une histoire qui se prolongerait de textes en textes comme dans le protocole R77. Envisager mise en ligne sur blog avec annonce des mots et publication des textes reçus en plus du sien semaine suivante ? Mais qui s’y collerait ? Ou alors publier les textes et demander aux lecteurs (Lesquels ?) de deviner les dix mots pris au dico.
Pyramider laborieusement les mots pour bâtir le livre, carnage des verbes, des noms communs, propres, sales. Même pas malicieusement. Sans servocommande le texte s’écroulera, les mots squameux, resteront flotter à la surface à la rencontre de rien. Et nous, tel le chambellan sur sa dunette, sombrerons dans les affres avec notre appendicite littéraire.
— Ce rêve très clair à la mémoire, sans doute au petit matin, sinon on ne les retient jamais. Toujours trouvé pénible d’écouter raconter un rêve. Pour soi, cette perte de contrôle inquiète et la netteté de celui-ci ajoute au trouble.
On est dans la dernière salle d’une exposition de peintures contemporaines. Grande pièce en béton. Œuvres non figuratives, rayonnantes de couleurs vives mais sombres aussi. Nous achevons notre visite. Je suis en compagnie d’une femme à la chevelure brune, haute, hirsute mais très travaillée. Elle me dit : « tout ce que tu ne peux pas avoir, photographie-le ! ». Je me dirige alors vers une autre femme brune vêtue d’une longue robe moulante vert anglais. Cheveux noirs et lunettes. Nous nous enlaçons. Réveil.
Mardi 27 septembre 2016 (soir)
— « L’Homme des Bois » Pierric Bailly (suite)
Aussi cette description d’un père en velléitaire des arts : une semaine s’imagine Picasso et court acheter du matériel de dessin et de peinture ; la semaine suivante, se rêve en écrivain et court acheter des cahiers pour écrire avant de renoncer.
— « Une poignée de sable » Tabukobu Ishikawa
Trouvé à la table du libraire. La forme classique du tanka mais au “je”. Novateur en cette fin du XIXe japonais. D’après le traducteur, l’ensemble forme le roman que le poète n’a jamais pu écrire. À l’impression d’unité de la vie dans les romans, l’auteur préférait l’écriture poème pour rendre la dimension fragmentaire de nos vies. Au Japon écrire des poèmes est un sport.
« Dans un coin du tramway bondé
je me recroqueville
soir après soir tout aussi pitoyable »
« Se réjouir d’écrire de mauvais romans
cet homme me fait pitié
Premiers vents de l’automne »
« Telle une pierre
qui dévale sa pente
voilà où j’en suis aujourd’hui »
— Dans de nombreux rêves au volant avec C et A à errer sur des chemins pierreux et secs dans la voiture familiale, très peu adaptée à la montagne. D’après O rien de plus classique : expression de mon sentiment d’impuissance à contrôler ce qui nous arrive.