Codicille : je mêle les pistes
sur le visage
entendues hier dans les mardis écriture (que je n’ai pu rédiger faute de disponibilité) en guise d’ouverture de chaque fragment puis ce qui peut faire merveille - je reprends le système des italiques qui instaure sa modalité de lecture. Le jeu fut bon à vivre.
les merveilles d’enfance sur l’ombre d’un visage, elles ont mon visage, mon visage à l’instant d’en effleurer l’évanoui, à l’instant d’y convoquer l’instant, sentir dans la bouche le goût du cassis, glace dans un cornet, premier sorbet, arômes du fruit pourpre, lourd et tannique, bouquet envoûtant dans les jardins de Versailles, et le mot jamais ne fondra
dans le visage de l’enfance, la ressource et la perte, le vertige de se regarder faire, de se savoir vu, le visage changé par ce qui de l’enfance le fragmente, il ne faudrait pas que se sache le secret, les nuits à poursuivre des lignes de lumières qui basculent le monde et conjurent les sorts
de ce visage voir se fendre le menton contre l’asphalte, la cicatrice en témoigne quand le choc est oublié, visages penchés sur les joues rougies, extase d’être consolée, bouches à déverser les inquiétudes, joie d’être soulevée, bras en corbeille, plaisir d’être portée, l’attention comme une chanson offerte à pleines mains, l’odeur de tabac s’y mêle
les traits, dit-on, de ce qui fait visage, identité, présence, les traits à grands traits, convoquer les dix ans en chemise, un soir d’étoile
cheveux matière sauvage à friser, défriser, à pousser sous la lune, à envahir comme herbe folle, et un carré dompté, la sauvage enfermée, et dedans la chamade, l’emballement, le frisson
visages inconnus, ligne de sourcils pour horizon, nez montagne à apprivoiser, bouche limite des inconnus, arrondis d’enfance à laisser derrière soi, la poussière du jour n’en finit pas de descendre dans une éruption colorée, au bord du toit s’y asseoir, assurée de solidité, un outil en main, laisser venir le vague de la journée qui se termine
les badigoinces, ainsi nommées nos lèvres, nos joues, nos mentons, à mieux rincer, à toujours essuyer, avec un peu d’humide y effacer les traces des merveilles, petites merveilles de pâte sucrée cuites en friture et poudrées de sucre, à fondre et croustiller, aux effluves de fleur d’oranger, craquements d’un petit orage sous la dent, les doigts collants de plaisir
visage patate, herbe en guise de cheveux, visage chaussure, œillets de lacets en guise d’yeux coquins, visage pendule et les aiguilles pour bouche ou sourcils, visage fauteuil, sombre présence du temps, les instants mouvants, se glisser dans leurs ombres, y franchir des limites ou des portes, des ouvertures ou des profondeurs, y danser sans bouger, s’y mouvoir sur des rythmes en bloucle, y enfouir des rituels, la précision des gestes répétés, le grand calme qui en résulte, le coeur à l’envolée, l’odeur de l’encre sur les doigts
visages, guirlandes, rondes folles, fleurs, alternatives, petites libellules, variations, mondes ronds, animaux, perspectives, en faire partie, être de la troupe, participer à l’affaire, et prévoir des listes, et rédiger des listes, et cocher des listes puis tremper des verres dans le sucre, cuire des crêpes et mélanger des jus, tremper les lèvres dans des alcools, et danser
dans le visage de l’enfance quel soi …le vertige de se regarder faire ( je ne sais pas la proposition d’écriture de mardi mais j’aime se rapprochement )… la sauvage fait danser les visages ( les nuits à poursuivre les lignes de lumière )
Merci Nathalie,
Faire des merveilles de choses infimes quand il a manqué les principales. Et le rapport aux visages, un grand mystère quand il faut y lire comment se comporter.
Intéressante mise en abîme que voir ces visages voyant, manière de reformation de miroir.
Merci Perle, oui mise en abîme…, le texte va de la périphérie au centre, merci du retour.
après une première lecture brouillonne, je ne m’y suis pas retrouvée… alors je me suis mise à rechercher l’objet de ces émerveillements un par un, lentement, posément…
et cette démarche lente et sensuelle m’en a révélé certains des miens : le goût si prononcé du cassis, les zones de lumière mouvante, le bonheur d’être soulevée de terre dans les bras de quelqu’un…
Un texte où l’oral à sa place, et la lenteur, oui, merci Françoise.