Je vais bien je suis indemne même si j’ai du mal à ouvrir les yeux et que je sens que la nuit veut s’imposer autour de moi mais il fait jour et je n’ai rien je sens mon coeur battre la chamade pas une égratignure au coeur de ce magma de tôles enchevêtrées de voitures en collision mon esprit sourit à la vie qui était à deux doigts de me filer sous le nez je vais bien je sens l’essence qui transpire de ce magma de tôles j’entends des gens qui m’appellent qui me parlent qui se parlent il a grillé le feu rouge je ne l’ai pas vu il roulait trop vite je vais bien j’ai le goût de la peur dans la bouche les deux voitures forment un ying et un yang rouge et blanc unies en un seul bloc une seule boule une seule compression une oeuvre d’art qu’une dizaine personnes entourent et admirent maintenant je vais bien des files de voitures s’agglutinent de part et d’autre de la route comme des flèches dont l’extrémité se réunit en un point qui est cette sculpture rouge et blanche entourée de gens venus voir aider parler une ambulance se fraie un chemin en remontant une file comme elle peut avec sa sirène hurlante et les flashs stroboscopiques de son gyrophare les flèches s’agrandissent et se transforment en toiles d’araignée suivant le tracé des rues qui se rejoignent s’encombrent et s’embouteillent les klaxons s’amenuisent les bruits se fondent dans ceux de la ville la toile d’araignée est engloutie et disparaît laissant la ville à sa placidité et à son inertie une tâche un point une pensée je vais bien
c’est prenant cet emprisonnement, j’ai pensé au monologue de Piccoli dans Les choses de la vie.
Oui, j’y avais pas pensé. Ou pas volontairement. Merci.
Bonjour Jean-Luc,
ce ‘je vais bien’ seule arme contre ce que le recul dévoile, le zoom qui construit de mots ce qui se défait de vie, (enfin, c’est ce que je ressens)
CatS
Merci Catherine. Ce « zoom qui construit de mots ce qui se défait de vie » est une belle image. À dire vrai, j’y avais pas pensé mais ça me plaît.
réussi et prenant.
Merci pour ton passage Danièle. Et pour tes mots.
Ah, la puissance de la litanie, je vais bien. Le sans ponctuation fonctionne à merveille. Merci, Jean-Luc.
Merci d’être passée Anne.
J’ai ressenti l’angoisse rétrospective mêlée au soulagement comme les tôles rouge et blanche, et j’aime l’image abstraite qui se forme en prenant du recul. Tu vas bien. Ton texte aussi.