« Pour visiter, adressez-vous au Cocoa Tree » : vous suivrez l’écriteau qui conduit vers une chocolaterie, nichée dans un village de pêcheurs – là, contre une pièce de £1 vous obtiendrez la clé, celle qui ouvre la grotte, un autre écriteau vous indiquera l’interrupteur, car sans lumière vous ne sauriez pas ce qui se trouve à l’intérieur, vous ne sauriez rien de la voute, de l’autel, de la présence du reclus, Saint Fillan, qui y aurait séjourné au 7ème siècle, vous ne sauriez rien de la mer qui montait jusque-là, avant que le port n’existe, et quand bien même vous allumeriez la lumière, quand bien même vous vous y recueilleriez, quand bien même vous laisseriez l’humidité vous atteindre, vous ne sauriez rien de plus du lieu ni de son histoire ; alors, vous vous retirerez en prenant soin d’éteindre en partant.
Une passerelle grillagée sous laquelle coule de l’eau : tes doigts sont gantés, tu me tiens fort la main tellement ca gronde, tu ne veux pas regarder en bas mais la tentation est trop forte, regarde ça tourbillonne, ça bouillonne, on dirait de la choucroute – six mois plus tard on reviendra, tu porteras des sandales, tu me lâcheras la main pour courir vers la rambarde, tu me demanderas de l’expliquer ce que c’est que l’Œil de bœuf et je serai rassurée de ne pas avoir à donner d’explications géologiques : c’est un trou, un trou vers les profondeurs, là ou l’eau et la Terre re rejoignent, c’est là que vient se reposer toute d’eau qui est tombée avant d’aller donner à boire aux champs, tu te souviens à Noël comme c’était rempli, et là tu vois, l’eau est toute partie mais la terre a encore soif.
Trois pierres posées dans un bassin : au cœur du village il y a un parc, un parc en pente orné d’arbres massifs – Ginkgo Biloba, Hêtre pleureur,Cèdre de l’Atlas, Abies Pinsapa, Acajou de Chine, Tilleul nous renseigne un guide ; au cœur du parc il y a un pavillon, une Orangerie, mais ces mots sont bien trop précieux pour les habitants ; il y a une porte toujours fermée, un tunnel circulaire, un arbre noueux sur lequel grimpent les enfants, un filet d’eau qui se termine dans un bassin abrité par une cavité aux parois lisses ; dans cette cavité il y a une statue, pour y accéder il faut sauter de pierre en pierre, les villageois viennent lui apporter des fleurs et, quand personne n’entend, lui demander qu’elle veille sur eux ; à côté du parc il y a tous les autres, il y a les disparus, les aimés, les oubliés, il y a les plus grands secrets qui jamais ne parlent.
Un vieux torchon bouche le trou d’une vasque en ciment : à une extrémité, un mécanisme de pompage, une manivelle rouillée, un robinet ; nous nous y mettons à plusieurs pour tourner, et par l’addition de nos forces, toujours la même surprise, la même joie, l’eau jaillit, nous voilà sourcières, vite il faut boucher le trou d’évacuation pour que l’eau ne s’échappe, pour remplir l’abreuvoir jusqu’à ras bord, retirer le torchon, et regarder le flot se déverser dans la cour en pente, dans la rue, à l’intérieur ça mange et ça cause fort, qu’est-ce que vous êtes encore allées jouer avec l’eau, c’est une vraie guenille ce torchon – ils ne connaissent pas nos bonheurs, ils ne connaissent pas cette source qui chez eux s’est tarie.
Comme ces textes sont évocateurs, merci !
Merci Laure pour votre lecture généreuse 🙂