Ils disent : « Ici c’est Pantin-sous-Bois, là-bas Pantin-sur-Seine » Le bois dont ils parlent est un espace sombre, mal éclairé, un bois de Méchant Loup. La Seine n’est pas la Seine. Ils parlent de Seine pour dire « Paris ». Parce qu’ici on n’est pas à Paris. Paris on y accédait par le tunnel qui a été muré. Paris on y accédait en enjambant les corps shootés qui jonchaient le tunnel. Maintenant, à l’entrée du tunnel, il y a un mur de parpaings mal cimentés – les maçons n’ont pas fignolé. Pantin-sous-Bois est une ville de façades aveugles, de coiffeurs à 8€, d’hommes ivres de Heineken – une extension du bled. Pantin-sur-Seine est une ville de douces circulations, de barques louées à l’heure glissant sur le canal, une ville de Spritz et d’IPA – une extension du XIXe. Les deux villes n’existent que dans la tête de ceux qui vivent « sous-bois » – le « concept » ne traverse pas les voies du RER E qui tranche Pantin en deux, nettement, cruellement presque. Dans quelques années Pantin-sous-Bois aura disparu. Dans quelques années les hommes du bled transporteront leurs fûts de Heineken vers d’autres villes, mais lesquelles ? Dans quelques années la frontière avec les pauvres aura l’inatteignable de l’horizon. Dans quelques années tous seront presque invisibles. Toujours ivres, toujours shootés, mais presque invisibles, juste aperçus au fil de l’eau, au rythme doux des barques qui descendent le canal de l’Ourcq à l’heure de l’apéroBert
Photographies ci-dessus : Paris, 1 rue Berthier. © Xavier Georgin.
il y a eu autrefois le «Pantin canal de l’Ourcq» de Mathieu Bénézet chez Digraphe, un Pantin que je ne retrouve plus aujourd’hui mais que toi tu sais voir
Quand les frontières craquent à Pantin, c’est toujours les pauvres qui morflent.
Merci pour ce texte Xavier !
la misère des hommes qui en fait des pantins dans ces villes au drôle de nom. Merci