La rue est, pilonnée sans pitié par le soleil. Le bitume fond et forme des coulures poisseuses, noires et brillantes sur la chaussée. C’est midi, il n’a personne, ni pigeon, ni voiture, ni passant. La ville ploie et se tait absolument. Et le silence est lourd d’une menace diffuse. (Le Lyon de René Belleto, mon souvenir de Changning, Shanghai)
L’avenue est sombre et venteuse. Un vent froid vient des montagnes. La suie des usines de la Fiat a noirci les immeubles bourgeois. Le tram cisaille la place pavée avec des grincements stridents. Sous les arcades, des passants marchent voutés serrant leurs gros pardessus sur leur poitrine. (Le Turin de Primo Levi, mon souvenir de Grenoble)
Une fumée d’usine s’échappe des hautes cheminées d’usine et flotte grise et rose au-dessus des toits. On sent une odeur de saucisses et en dessous les relents humides de l’Hudson. Des gosses roulent à bicyclette dans la rue défoncée. Certains sont juchés rêveurs sur une bouche d’incendie ou lisent un illustré assis sur les marches d’une maison. Les habitations sont à deux étages, un perron de bois qu’on atteint par une volée de marche après avoir traversé un jardinet, propret ou négligé c’est selon. (Le Newark de Philip Roth, mon souvenir « fabriqué » de Newark)
Une enfilade maussade de maisons massives, beiges aux volets blancs fermés. Des roses trémières poussent aux coins des rues, petits points colorés dans la brume. Les rues, ou plutôt des routes étroites, s’étirent en longueur sans espace pour marcher à pied. Des camions passent soulevant des gerbes de pluie. Un souvenir voilé de beige et d’ennui. (Le Brive-la-Gaillarde de Marie N’Diaye, mon souvenir du Mans)
Quatre auteurs et quels auteurs ! n’avais pas pensé à ces mots pour décrire ma ville, votre quatrième fragment. Pas de souvenirs de roses trémières. Merci
Vif, coloré, j’ai beaucoup aimé, merci