Si j’avais été plus longue, je serais allée jusqu’à Angers, me serais jetée dans les bras de la Loire.
Mais malheureusement la commune de La Perrière – qui depuis le 1er janvier 2017 s’est fondue avec cinq autres dans une commune nouvelle appelée Belfôret-en-Perche – en était trop éloignée. Je me suis fatiguée dans de nombreux méandres. Le sud du Perche m’a séduit, j’ai respiré les effluves de la forêt de Bellême qui sont venus jusqu’à moi.
Au moins onze affluents sont venus me grossir. L’un s’appelle la Rhone, je ne me refuse rien et me prend soudain pour une grande du monde des rivières.
Imaginez-moi à ma source et suivez-moi. Je traverse l’Orne – Guillaume le Conquérant, devenu Guillaume 1er d’Angleterre, est peut-être venu tremper ses pieds royaux dans mon eau – l’Eure-et-Loir pour arriver enfin en Sarthe – plus stylé que dans la Sarthe – où La Ferté-Bernard, Connerré, Montfort-le-Gesnois, Champagné et enfin Le Mans m’accueilleront parmi d’autres villages tout aussi charmants et verdoyants – grâce à moi.
161 ou 164.50 ou 191 kilomètres – il va falloir que tout le monde se mette d’accord – pour arroser un bassin de 2 385 km². Je vous épate de toutes mes connaissances. Lisez même que le 24 janvier 1995 – date que j’aurais dû glisser dans la 22, j’ai loupé le coche – je me suis offert une crue d’ordre cinquantennal.
Quand je vous dis que je suis douée. J’ai toujours été passionnée par la géographie.
Je coule, je glisse, j’entoure, je flatte, je traverse, j’admire des châteaux, des tours à mâchicoulis. Je visite la Venise de l’ouest. J’y ai vu de belles masquées, des gentilshommes franchissant la porte Saint-Julien. J’irrigue les canaux où des barques électriques promènent des familles savourant le calme des lieux. Je rêve de Ronsard, Du Bellay. Je rêve car leurs pas les ont-ils menés jusqu’à moi, je l’ignore.
Je continue de couler et m’émerveille de jour en jour.
Arrive soudain Pontlieue. Terminus aurait crié le chef de gare. Non, vive les moulins !
Je me suis épuisée quand j’ai rencontré la guerre. Les vendéens ont brisé le pont qui m’enjambait.
Je suis lasse. Je coule… et me baigne dans la Sarthe, me dilue, y mêle mes eaux, m’y confonds.
Je ne suis plus !
Basile vous prie de l'excuser mais l'Huisne s'est imposée et a exigé d'être le sujet de cette proposition. Il a été difficle de lui résister.
Tout droit ou dans les méandres, l’Huisne finit par s’abolir dans la Sarthe.
Beau trajet !
Merci Danielle.