Tu connais bien cet endroit, tu t’es souvent assis sur la planche posée sur deux morceaux de troncs qui fait office de banc, le dos appuyé contre le mur près de la porte. Tu bois un verre d’eau au tuyau qui alimente le bachal. Il y a toujours un verre posé là.
Une chevrette et ses deux petits déjà grands, viennent boire. Elle vient boire là tous les jours depuis plusieurs années, un trou dans le sol, de la mousse, de l’eau fraiche. L’abri sombre des arbres juste derrière, la pente qui les protège. Aujourd’hui elle sent des odeurs nouvelles il y a des outils, un tas de cailloux, un trou très grand et tout en longueur. Elle est inquiète.
Tu sais qu’ils se retrouvent là, la grange n’est pas fermée et il y a un gros tas de foin. Ils se mettent d’accord sur l’heure au collège, et ils disent qu’ils vont courir, s’entrainer pour le ski cet hiver. Pas de messages, aucune trace sur leur téléphone, on sait jamais avec les parents. Ça dure depuis bientôt deux mois. Il va falloir qu’ils trouvent un plan pour les vacances. Tu penses que tout le monde sait, mais que personne ne dit rien.
Il fait chaud aujourd’hui, il freine, s’arrête et appuie son vélo sur le mur de ce bâtiment dont la cheminée s’est écroulée et il fait une pause, bois un verre d’eau et rempli la poche à eau de son sac à dos. Assis dans les herbes, il reste un moment, là, à rêver, à penser il ne saurait pas trop bien dire à quoi, à regarder les arbres, à écouter les oiseaux. Puis il remonte sur son vélo et repart.
Tes pas laissent des marques dans la neige, le bachal n’est pas gelé et l’eau coule encore, l’hiver vient juste d’arriver, les feuilles mortes ont encore de belles couleurs vives, tu t’assois sur le banc et après avoir bu tu n’oublies pas de retourner le verre pour éviter que l’eau, en gelant, ne le fasse éclater.
La pluie ne l’a pas surprise, elle avait bien vu aux nuages que le ciel était d’humeur pluvieuse, alors elle a pris une veste et maintenant, elle rabat la capuche sur sa tête. Les gouttes dessinent des ronds parfaits, qui grandissent, se rejoignent et se mélangent, elle reste là longtemps son verre à la main, à regarder les gouttes tomber dans l’eau, éclater à en rebondir sur la surface, puis se dissoudre dans la grande eau sombre, tandis que d’autres gouttes viennent battre les secondes sur sa capuche.
Tu n’arrivais pas à dormir alors tu es parti te balader. Les feuilles n’ont pas encore commencé à reverdir les arbres, il y a un bout de lune, tu as ta lampe frontale dans la poche mais tu ne t’en sers pas. Avant de voir les bâtiments, tu vois déjà la lueur du feu, l’odeur des pormoniers, les voix. Tu n’avais jamais vu personne, mais tu voyais que l’endroit était entretenu, parfois habité. Rideaux aux fenêtres, herbe coupée, tas de bois qui montent et descendent. Aujourd’hui, tu n’iras pas boire un verre d’eau au tuyau du bachal.
merci Juliette, j’irais bien faire un tour à Combazerou et gouter des pormoniers (connais pas)
Les pormoniers sont de grosses saucisses avec beaucoup d’herbes, des légumes …. Chacun a sa recette en fonction des goûts et de ce qu’il y a dans le jardin. Blettes, choux, poireaux ….
Et merci pour la lecture !
Beau moment de lecture, Juliette !
Merci à toi !
un petit air de mystère dans ce texte… qui lui va si bien. Merci