#40jours #20 | Le paquet

C’est en rangeant l’appartement hier que je l’ai trouvé. J’ai toujours du mal à jeter les choses quand elles peuvent encore servir mais à qui les donner, j’ai l’impression dans ces moments-là que je ne connais plus grand monde. Les amis achètent du neuf. Les enfants et leur mère ont ce qu’il faut. Les commerçants prétendent vendre un produit de meilleure qualité. L’homme qui fait la manche à côté du distributeur de billets semble avoir d’autres soucis. Bien entendu, je pouvais laisser le paquet dehors sur le trottoir et jeter un coup d’œil de temps à autre pour le voir enlevé. C’est étrange ce besoin qu’on a au fond de connaître celui à qui l’on donne. J’ai fini par me perdre dans les rues, mon paquet à la main, sans oser le poser quelque part. Tout semblait vain, comme les fois où on hésite tant avant de faire quelque chose qu’on finit par la trouver dénaturée, déjà passée alors même qu’elle n’existe pas encore. Je me suis senti épuisé au point de m’endormir dans ma rame de métro. Mes pensées, celles que j’avais depuis le réveil, me quittaient une à une ou se faisaient si petites que leur importance m’échappait. Elles n’étaient plus rien à côté de ce corps que je serrais dans mes bras et de ces lèvres que j’embrassais.

En arrivant à ma station, je me suis réveillé en sursaut. J’ai bondi à temps sur le quai avant que les portes ne m’attrapent. Je montai les marches quatre à quatre pour revenir à la surface. Je me sentis si léger que je commençai à siffloter. Je pensai à cet ami que je ne voyais plus. J’étais installé en terrasse d’un café pour l’appeler avant même d’en avoir l’idée. Nous avons beaucoup ri. Nous faisions de grands projets en sachant bien qu’il était plus savoureux de les évoquer ensemble que de les faire.

Je suis rentré avec la nuit et cette impression lointaine d’avoir perdu quelque chose sans importance. En me couchant, je parlai à ma douce de ce rêve étrange que j’eus la nuit passée : je m’étais levé un matin avec un trop plein d’amour dont je ne savais que faire. Elle m’écoutait d’une oreille mais je ne pouvais pas lui en vouloir. Elle était fatiguée de sa journée et son trajet de retour avait été difficile. Une histoire de colis piégé.

A propos de James Hardy

Auteur imaginé par un scénariste de télévision. Le premier n'écrit pas assez au goût du second qui, lui, devrait balayer devant ça porte. Tous les deux font des fautes mais se trouvent toujours des excuses.

2 commentaires à propos de “#40jours #20 | Le paquet”

  1. C’est très beau, j’ai beaucoup aimé. Une simplicité toute poétique pas loin du rêve. Merci pour ce moment.