Elle ne sourit pas, première levée il fait encore nuit, elle ravive le feu dans la grosse cuisinière, chance ce matin il n’est pas éteint, elle s’est habillée sans se laver, la nuit colle encore à ses yeux endormis, tout doit être prêt quand ils vont se lever. Faire couler le café, mettre les bols sur la table, prendre la casserole pour chauffer le lait, le surveiller, ne pas le laisser déborder, elle n’a pas le temps pour le lait qui déborde.
Elle regarde la liste, tous les numéros à appeler sont là. Aujourd’hui il faut vendre la rénovation des chauffages, poser les questions : êtes-vous propriétaire de votre maison, avez vous plus de 60 ans, elle ne supporte plus ces questions obligées, et encore moins les réponses violentes. C’est vrai elle a un accent, il lui arrive de mal prononcer le nom de son interlocuteur, ce n’est pas une raison pour se faire agresser, pour se faire raccrocher au nez, pour qu’on lui manque de respect, quelquefois elle en pleure.
Elle ouvre et pousse les persiennes. « Faire entrer l’air et la lumière, c’est ce que vous devrez faire immédiatement en arrivant ». Voilà ce que le chef lui a dit. Elle met sa blouse bleue, attache ses cheveux avec un élastique noir, enfile des gants de caoutchouc rouge. Elle remplit un seau d’eau, y ajoute le produit désinfectant obligatoire dont elle déteste l’odeur. Le balai brosse et la serpillière sont accrochés à son chariot. Elle regarde l’horloge au-dessus de l’évier..
J’aime beaucoup, ce qui réchauffe, ce feu nourricier
par-delà ce qui fend et glace le sang
Bonjour Françoise, heureuse de votre commentaire qui me réchauffe comme une douceur. Merci