J’arrivais dans la ville par la navette qui remplacait le tram. Le voyage fut long et pénible. Le bus était rempli de gens fatiqués par leur journée de travail en ce mois qui cloturait une année calée sur le rythme scolaire. Les vacances étaient proches pour beaucoup, et bien méritées. Ils avaient traversé le covid tant de fois, s’étaient adaptés plus ou moins aux mesures qui en découlaient.
Je décidais d’arreter mon voyage un peu avant la dernière ville de la ligne, Villeneuve-la-Garenne, à la station « hôtel de ville ». Jusque là je ne connaissais même pas son existence. J’appris plus tard qu’elle était née d’une séparation en 1929 avec la ville voisine, Gennevilliers. Pourquoi, je l’ignore encore, mais l’idée de me poser dans une ville où les habitants avaient fait preuve collectivement à un moment donné de leur histoire de caractère, de détermination pour affirmer leur identité me fait ne pas regretter ce choix arbitraire.
« hôtel de ville » point central et très animé en ce soir de juin. Un festival de jazz s’y déroule. Une scène est installée le long du boulevard, et des rangées de chaises blanches et humides lui font face. Sur la scène 4 musiciens y jouent du jazz manouche. Les lumières de la ville et des rangées de spots s’y reflètent sur leurs instruments. Ils sont animés de la passion de leur art. Violon, guitares, contrebasse. Les spectatuers y boivent avec avidité les notes qui s’échappent de leurs mains mates d’artistes vituoses.
Je me mélange aux spectateurs pour m’abreuver avec eux de ces notes qui remplissent mon coeur d’harmonie et me font oublier la fatigue du voyage. Je n’écrirais pas ce soir, je me ressource, tel un voyageur assoiffé dans le désert qui trouve un peu d’eau claire et rare.
Tard dans la soirée, à la fin du concert, les techniciens démontent ce qui reste de ce moment festif. Après leur travail, il ne restera aucune trace sur le parvis de la soirée de ce soir. Mais dans le coeur des gens oui.
Le lendemain je me mets en quête de trouver un autre lieu pour enfin écrire. J’emprunte le boulevard Galliéni, qui prend sa source juste devant le parvis de la mairie. Je n’en vois pas le bout. Il est très emprunté par les voitures, même en cette heure matinale et dominicale. Je ne sais pas où elles vont. Je ne sais pas non plus où je vais, mais je sais ce que je cherche : Un endroit pour me poser et écrire.
Le long de l’avenue, des commerces : une boulangerie, une enseigne de restauration rapide, une autre qui promet la victoire dans la guerre contre les insectes nuisibles, un peu plus loin une banque dont les distributeurs sont pris d’assaut. Jour de marché aussi.
Je continue. Des pavillons, un collège en petites briques rouges. Un petit passge longe le collège. Je décide de le prendre. Il a un coté mystérieux, tel un couloir menant sur l’inconnu. A droite un mur, rempli de graffittis très insctructifs : des coeurs avec des prenoms pour les plus poétiques, des insultes aussi.Les adolescents y laissent des marques de leurs vies passionnées.
Le passage débouche sur une petite école à droite, ainsi que sur une vielle maison blanche en face qui se révelera être l’école de musique Claude Debussy. La musique est très présente ici. Deuxieme rencontre pour moi avec un des lieux où elle se manifeste. Version jeunes pousses. Espoir. Apprentissage. Les élèves y font leurs gammes tout comme moi je vais m’entrainer à l’écriture. Reste à trouver un lieu pour cela.
J’abandonne l’école et rencontre la Seine. L’eau m’attire et je décide de longer le quai en partant vers la droite. Des péniches se succèdent, habitations d’artistes : comédiens, compositeurs. Peut être un jour l’une d’elle sera mienne. Rêve.
Mes pas m’entrainent jusqu’à un endroit qui me cherchait plus que je ne le cherchais moi-même : « Au bord de l’eau ». Un petit café, qui me rappelle celui où je me posais enfant pour rêver, apprendre et écrire à Saint-Robert en Corrèze. J’y retrouve la même ambiance de village. C’est comme si je venais de faire un voyage spatio-temporel. Je n’en reviens pas. Je me pose, commande un café allongé. C’est décidé, sans hésitation aucune. C’est là et nulle part ailleurs que j’écrirais désormais.
Tout un grand trajet riche pour trouver ton endroit d’écriture.
Je t’ai suivie. C’était vraiment très agréable.
Merci Sandrine !
Merci à toi d’avoir pris le temps de la découverte et de m’avoir accompagnée sur ce chemin !
Ah voilà votre fleuve, chèrement trouvé, par l’érance et l’osbtination, bonne façon !
Oui, je l’aime mon bout de fleuve !