Mes cartes de fidélité sont des promesses brisées que j’accumule dans des boîtes à chaussures, elles côtoient d’autres objets que je contrains à devenir souvenirs alors qu’ils ne veulent pas, je les retrouve plus tard et je ne me souviens de rien, eux peut-être se rappellent mais le dialogue est devenu impossible, comme avec le marchand de l’épicerie asiatique, jamais je ne pourrais retourner dans sa boutique, je lui avais promis alors que je savais que, je ne passe plus devant chez lui, ni même dans le quartier, j’ai déménagé depuis et je pense que c’est à cause de ça, je ne pourrais supporter de voir sa boutique fermée ou remplacée par un énième vendeur de pokeball, les salades australiennes ou hawaïennes, cela dépend de ce qu’on raconte pour convaincre le copain parce qu’on n’a pas toujours envie de manger des sushis, le vendeur de sushis aussi, je suis la cause de leur faillite, l’épicier asiatique, lui comme d’autre, le libraire n’en parlons pas, le vendeur de café, ces gens qui plaçaient en moi la plus précieuse des confiances, s’ils savaient, ils savent bien en réalité, c’est évident, ils n’ont pas besoin de me voir moudre mon café, le café acheté ailleurs dans une boutique que je trouvais plus sympathique sur le moment ou mes livres, s’il savait pour mes occasions, des boîtes pleines, la carte Biocbon, la carte Picard, la Carte Monoprix, la carte Palais des thés que j’écrirais palais d’été mais je n’y connais rien en marketing, des dizaines de boîtes pleines, la carte Zem fruits, la carte Mikonos, la carte Cos combien de cartes pour combien de fois 5%, la carte H&M, la carte Fnac que je n’ai jamais dénié prendre parce qu’il fallait la payer, des dizaines de boîtes pleines au fond du placard, je suis parti loin de tout ça, j’espère qu’ils me pardonneront un jour et qu’ils m’oublieront, je ne peux pas croire qu’un visage comme le mien hante leurs nuits et pourtant c’est certain, mon sourire de faux-cul les torture, avec plaisir je répète avec mon sourire niais, avec plaisir j’ai pris leurs cartes en sachant que leurs efforts ne serviraient à rien, jamais je ne reviendrai, que leur tampon s’usait vainement, jamais vous m’entendez, car que je suis un de ces hommes dont la parole ne vaut plus rien.
Voilà qui est bien rigolo… (commentaire de haute tenue)