Marcher dans la ville rectifiée. Nager sur les trottoirs, crever les ponts, lécher les murs. Fatigue et ivresse, les mots disjoints corrigent la ville de sa réalité. Je titube dans les routes que je connais mais ne reconnait pas. Se perdre et tenter de s’accrocher aux briques.
Que fait cet oiseau seul par terre ? Tombé du nid ? Déprimé ? En mourance ? J’avance vers lui, mouvement de recul. Ce moineau malade m’a rejeté d’un imperceptible frisson.
Ouvrir les parenthèses et libérer les consignes. Disjoncter, j’ai besoin d’exploser, d’oublier, de pleurer le cul par terre à côté de l’oiseau méfiant et familier. Qu’est-ce qu’il fout là, avec tous ses moyens de voler et sa volonté de grogner sur le bitume ? Je pourrais le prendre dans mes mains mais ça me dégoûte. Je vais passer mon chemin, l’oiseau, c’est ta dernière chance. Sur le trottoir d’en face, rien ni personne, que des voitures vides de part et d’autre de l’asphalte.
Et l’oiseau respire calmement, l’œil sur les jointures des pavés. J’ai la tête qui tourne, je ferme les yeux, j’ouvre les yeux, il est parti.
Marcher dans la ville disjointe. Compter chaque parcelle de vie, se glisser dans les fêlures, écouter aux portes. J’ai perdu goût à la ville depuis que l’oiseau est rentré chez lui. Je vais aller me coucher et attendre que la chute ait cessé de me cerner.
J’ai beaucoup aimé cette disjointure. Des émotions que je ne parviens pas à nommer. Et « attendre que la chute ait cessé de me cerner ». Merci pour ce très beau texte.
Moi aussi comme Jean Luc beaucoup aimé ces ruptures, ces images de vous à l’oiseau et le titre est magnifique. Merci pour votre texte.
C’est beau le traitement dans le texte de cet oiseau « méfiant et familier » . Il y a dans ce petit texte un tourbillon d’émotion parties d’un petit rien et qui donne toute la pâte d’étrangeté du texte, bravo