Je n’ai plus assez de souvenir de la rue Lyonnaise c’était au premier étage et c’était deux pièces étroites avec une fenêtre sur rue et une autre sur cour peut-être des tissus indiens je n’ai plus assez de souvenir de la place de la Liberté sinon qu’on devait entrer dans une cour et qu’il y avait sur la gauche une porte ce n’était pas l’époque encore ni des codes ni interphones ni des téléphones mobiles on entrait où on voulait et si trop tôt on s’asseyait devant la porte je n’ai plus assez de souvenir de cette rue près du Jardin des Plantes sinon que là il fallait monter au moins deux étages et l’appartement éternellement sombre toujours même si la seule pièce où on discutait c’était à cette table devant l’évier de cuisine et cette fenêtre à la verticale sur la rue comme sciée dans la ville je n’ai plus assez de souvenir de cette chambre avec cheminée condamnée la seule que j’ai eue à un rez-de-chaussée une pièce en angle la fenêtre sur la rue la moins passante mais le mur côté de l’autre rue tremblant avec les voitures comme si elles roulaient sur ton lit je n’étais pas resté longtemps je n’ai pas assez de souvenir de cette chambre plutôt une surprise avec son balcon donnant sur la rivière enfin c’était exposé sud et on l’apercevait c’était en fait juste derrière l’hôpital coincé entre l’hôpital et la rivière plus aucun souvenir de comment j’avais pu l’obtenir petit annonce à même les réverbères dans les rues ou gratuit de petites annonces ou parce qu’un autre en avait été locataire non c’est tout parti et même l’intérieur je n’ai plus aucun souvenir de l’intérieur sinon que la moquette aurait pu être rouge et le bureau plus le lit puisque toutes ces chambres pour étudiants étaient meublées d’à peu près la même façon mais dans le fond de la tête c’est à peine un reflet rien d’autre je n’ai pas assez de souvenir de cette barre d’immeubles un peu jaune aux pièces étroites et l’escalier de ciment résonnant le balcon où tu as pourtant pris des décisions on ne sait jamais si c’est les bonnes décisions je n’ai plus assez de souvenirs à la Zup Nord de cet appartement de fonction dans le collège puisque le père du copain en était proviseur ou en tout cas astreint à y loger mais le week-end c’était pour qui voulait on avait juste à récupérer la clé juste un peu bizarre la vie dans une école mais une vie clandestine je n’ai plus un seul souvenir de comment c’était chez J-P et sa compagne eux un peu plus âgés mais on y passait régulièrement je peux en gros localiser le quartier mais même la rue non rien je n’ai plus assez de souvenir pour décrire cet appartement sur la partie de rocade derrière la gare quartier Saint-Léonard ça existe quartier Saint-Léonard avec cette usine à cigarettes qu’elle était elle qui tenait porte ouverte et dans son salon la passion du jeu de tarots et leur vocabulaire le chien l’atout et ce qu’ils en murmuraient sans qu’à deux mètres tu comprennes ça allait très vite mais ça leur durait des heures plus de souvenir non plus de cette ancienne grange dans un dédale de chemins de campagne où Dumuids m’avait emmené avec deux voire trois autres en se serrant parce que j’avais une voiture et eux pas il y avait des sortes de boxes à rideaux épais et l’après-midi les élèves ingé ils se terraient là pour des joints moi je n’aimais pas trop ça ne me faisait rien en plus je devais ramener la voiture dû faire ça deux trois fois et ensuite qu’ils se débrouillent ça devait être quoi dix douze bornes de la ville entre le Maine et la Loire il est devenu quoi ce Dumuids d’ailleurs je n’ai plus de souvenir et pourtant les rues se refont et pourtant tu pourrais cocher encore ici à deux rues près une autre chambre une autre adresse et bien sûr qui ça intéresserait à pile cinquante ans d’écart tu parles.
Merci François pour ces souvenirs lointains et pourtant bien présents.