Le tiers de L’Aite, c’est arriver à Mons par Crotteux, parce qu’il y avait deux Mons, mais nous ce n’était pas Mons Crotteux. La rue de L’Aite venait-elle bien de Crotteux ou de Grâce-Hollogne ? Et pour Hollogne aussi il y en avait plusieurs, je me souviens de Hollogne-aux-pierres, bref le tiers de L’Aite et j’ai dû allé voir sur Google pour savoir comment l’écrire, même si dans ma tête j’entendais distinctement le mot, c’est une rue qui monte pour arriver à l’autre Mons, Mons-lez-Liège, celui-là. Mais depuis mon souvenir c’est juste une rue qui descend, qui descend si fort qu’on ne voit rien de ce qui existe après, quand on ne va jamais plus loin que la reproduction de la grotte de Lourdes, le petit jardin clos par un muret de briques surmonté d’une belle grille toute blanche, il faut entrer par le côté, pousser la petite barrière et lever les yeux. Dans le trou de la roche en hauteur la vierge Marie reconnaissable aux habits qu’elle porte, toujours les mêmes, voilage blanc et bleu ciel, nous regarde. En bas le grand creux de la grotte est occupé par une table pour le prêtre officier, du temps où ça se faisait encore. Pour nous enfants, c’était juste imiter la petite sainte en s’agenouillant pour prier. J’ai toujours pensé que mon écriture venait de là, du parler dans sa tête de ce qu’était pour moi prier. Mais c’est une autre histoire. Le tiers de L’Aite dont le nom m’est resté à cause de l’anecdote racontée cent fois à propos de l’aïeule du côté paternel, ceux qui ne fréquentaient pas l’église, et avait pour prénom Éléonore, un nom de reine pour elle née d’une famille de mineurs, qui a vécu jusque nonante ans, et pour illustrer sa robustesse on rapportait ses mots, ses plaintes à propos de sa santé qui n’allait pas, disait-elle, elle le sentait bien, de ce Tiers de l’Aite qu’elle avait remonté à passé quatre-vingts ans par une chaude journée d’été eh bien disait-elle arrivée en haut, j’étais fatiguée. Ce Tiers de L’Aite qui était une rue sans fin qui montait comme ça, il fallait le geste pour raconter aux petits ou à ceux qui n’étaient pas d’ici, alors que ceux de Mons l’avaient empruntée quotidiennement pour revenir de Crotteux ou de Grâce quand ils avaient raté le tram et plus tard le bus… Le tiers de L’Aite bien connu de ce que chacun l’empruntait chaque jour pour revenir de Crotteux ou de Grâce quand on avait raté le tram et plus tard le bus. Mais pour nous depuis la grotte, c’était juste une rue qui descend si fort qu’elle disparaît comme on plonge et jamais aller au-delà. Arriver à Mons par l’autre côté, on ne le faisait pas. Maintenant c’est tout à côté de l’autoroute qui relie Namur à Liège et c’est un atout supplémentaire pour ce quartier qui était neuf il y a cinquante ans, avec sa grande place toujours déserte et son parc qui a mis du temps pour mériter son nom depuis la plantation des arbres aux troncs tout fins. Depuis ils se sont bien étoffés, apportent ombre efficace pendant les canicules, s’il y avait quelqu’un pour s’y promener. Mais personne vraiment pour en profiter. Les nouvelles constructions abritent des familles qui ne rentrent que le soir. La place fait négligée avec ses herbes folles entre les dalles, mais personne pour s’en plaindre vraiment. Chacun ici a son jardin à entretenir. On ne manque pas de verdure. Le parc est superflu. Parmi les autres, des maisons pour logement social peintes en blanc et jolies, même si elles datent un peu, aux briques repeintes en blanc sur de belles parcelles et individuelles ou par deux. On ne remarque leur destination que parce qu’elles sont d’une architecture identique. Pour rejoindre Mons, il y a un troisième accès. Il faut arriver à la place Victor Mottard dont on a déjà parlé, avec ses nids de poule dans la terre battue et son école éradiquée. Elle a été reconstruite dans le quartier proche de l’autoroute. Le bourgmestre a dit que selon les études c’était moins onéreux de la raser pour reconstruire une neuve.