J’ai toujours été fascinée par les cartes, les vieux plans de villes avec les reliefs, les cartes IGN et leurs petites croix frontières, les plans gratuits donnés dans les Offices du tourisme, les cartes Michelin, les atlas routiers labyrinthiques dont les feuilles s’arrachent, prennent l’humidité sous le siège de la voiture. J’aime étudier mon itinéraire sur google maps avant de me lancer sur une route nouvelle. Et depuis peu, j’aime la cartographie thématique : ville du mâle, carte féministe de la ville, infographie décoloniale, carte de Tendre, inventaire des façons régionales de dire « pain au chocolat » en France ou index des rues de Paris où un crime a eu lieu. Mêler l’espace et l’histoire, les petites histoires. Perdre des heures sur le site de Jules Grandin, où l’Atlas de l’amour côtoie le rideau de sang sur la Syrie. Beauté des lieux, des émotions, des horreurs. Répertoire graphique des faits et des chiffres.
Cartes des bancs publics de Paris. Cartes des bancs publics de Paris ! Tout le potentiel de rencontres, de portraits, dialogues volés, pensées, évasions, ennuis, attentes, convoitises, frustrations, déclarations d’amour, premiers baisers, conversations trop bruyantes au téléphone, sexe, ronflements, vents frais, pluies soudaines, pieds nus, chaussures crottées, livres (volontairement) oubliés, révisions d’examens, larmes, sandwichs délectés, voyeurisme, étirements de mollets, pisses de chiens, coups de becs, cœurs gravés, prénoms croisés, retrouvailles, lapins, trop tôt, trop tard, arrivées, nettoyages de miettes, départs, vides, silences, ombres.
C’est la magie des cartes : on commence à un endroit, on se perd dans le souvenir et on débarque dans l’imaginaire.
Votre excipit, un régal