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[Ecole Aimé Césaire, 9 esplanade Edouard Glissant, Nantes]
Toit végétal qui fait penser aux paysages de landes ou de dunes de la côte vendéenne : végétation herbue rase, jaunie et brûlée par le soleil et le sel, petits chemins en lattes de bois qui mènent tous plus ou moins à la mer. Ici, le chemin de bois légèrement sinueux dessert à la fois un premier étage donnant sur un espace goudronné en terrasse et en contrebas une cour de récréation ovale et bétonnée, organisée en espaces bien délimités : une marelle, une petite aire de jeu avec toboggan et passerelle, un panier de basket, un espace de plantation, et deux arbres, l’un relativement fourni, l’autre chétif. Autour de l’école, de grands immeubles. A gauche une vaste esplanade. Le Boulevard des Antilles longe l’école. Le ciel est gros et gris de grains.
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[Station de métro Aimé Césaire, Ligne 12, Aubervilliers, juillet 2016]
« Ici se construit la future station Aimé Césaire. » Pelleteuse, benne, engins, tuyaux, camion, ombre d’une grue, voiture de service. Le bitume est éventré en une longue faille laissant à nu une roche blanche de sable, calcaire, argile, marnes. Les marquages jaunes au sol et les barrières et glissières de sécurité bardées de panneaux indicateurs délimitent les espaces, orientent la circulation routière et piétonne, sécurisent le chantier. Quatre hommes en chemise discutent : deux d’entre eux regardent le chantier ; les deux autres font face à la rue. Un cinquième marche le long du futur tracé sur un espace réservé aux piétons. Derrière le chantier, de l’autre côté de la rue, une publicité très colorée pour un magasin, « Le Matériel forain » et un bâtiment aux formes géométriques épurées abritant les « Peintures LAGAE ». De larges trainées de nuages indisciplinées strient le ciel bleu. Personne sur le chantier. C’est la pause méridienne.
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[Arrêt de bus Aimé Césaire, Eysines]
Une haie hirsute borde l’arrêt de bus à ciel ouvert. Pour le signaler, des zébras jaunes sur le sol et un petit panneau indicatif carré à hauteur d’yeux : le mot « bus » dans un rond, le nom de la ville, « Eysines », le nom de l’arrêt, « Aimé Césaire » et un numéro en rouge, « 38 », identifiant la ligne. A droite de ce numéro, tout en bas du petit panneau, la mention « Mérignac Phare », point de départ de la ligne. En haut à droite l’acronyme du réseau : TBM (Transport Bordeaux Métropole). Un panneau rectangulaire juste en dessous détaille les 43 arrêts de la ligne 38. Le trottoir est mangé en partie par les herbes et les pissenlits qui s’échappent de la haie et des terrains à vendre derrière. Un poteau électrique semble surgir de la haie. Sur le trottoir gris, une bouche d’égout. Un peu plus loin, un pylône électrique rouge et blanc à haute tension : le quartier est à proximité de l’aéroport Bordeaux-Mérignac. Des maisons basses individuelles aux toits de tuiles ocres jouxtent le pylône. Le ciel bleu est strié de fils électriques. Pas d’avion en vue.
1. J’ai tout de suite pensé à Aimé Césaire. Puis j’ai hésité avec Edouard Glissant – que j’aime notamment tellement pour sa politique de la relation dont notre monde a tellement besoin -, avant finalement de rester sur mon intuition première. Il se trouve que l’un des trois lieux, l’école Aimé Césaire à Nantes se trouve sur l’esplanade Edouard Glissant. Je le découvre après coup.
2. Google Map répertorie seulement deux rues Aimé Césaire en Guadeloupe, l’une à Baie-Mahault, l’autre au Moule. La Martinique fourmille de toponymes Aimé Césaire. De fait, Aimé Césaire est martiniquais.
3. Streetview n’est pas fonctionnel en Guadeloupe et Martinique. J’ai donc exploré les lieux Aimé Césaire en France hexagonale. Après tout, pourquoi pas, c’est intéressant d’y mesurer la représentativité d’un des plus grands poètes antillais dans la toponymie des espaces publics de l’hexagone. 180 résultats sur Google Map.
4. Je remarque après coup que deux de mes lieux se situent dans deux anciens ports négriers, Nantes et Bordeaux…
5. J’aime ces échos, ces relations entre les espaces, les lieux : le pylône électrique à haute tension rouge et blanc me fait penser à un phare. Image-écho au premier arrêt de la ligne : Mérignac- Phare. Je découvre la proximité de l’aéroport en menant des recherches sur ce type de pylône à haute tension que l’on ne retrouve apparemment qu’à proximité des aéroports. J’élargis la carte. En effet, l’aéroport n’est pas loin du quartier de l'arrêt de bus. Le phare. L’aéroport. Deux manières de relier les deux espaces ultra-marins : la mer et les airs.
6. Parmi les quatre hommes qui discutent près du chantier sur la prise de photo Streetview, un seul homme de couleur noire, plus petit que les autres. Sa chemise est noire tandis que les trois autres portent une chemise blanche.
7. Toponymie des alentours de l’école Aimé Césaire à Nantes : Esplanade des Riveurs, Esplanade des Traceurs de coques, Parc des chantiers, restaurant Les Funambules, Les Machines de l’Île, Carrousel des mondes marins, Parvis des Nefs, Boulevard de l’Estuaire, Grue Titan Jaune, Café de la Branche. A deux pas un des coudes de la Loire.
8. "De Césaire : Contre la Bête, se faire arbre, fleuve, et de chaque mot, senner des continents de vie.- Sentimenthèque." Patrick Chamoiseau, Ecrire en pays dominé, Folio, p. 73.
J’aime beaucoup cette visite de lieux à la frontière, les détails des lignes et des panneaux. Et merci pour le codicille aussi dense que le texte.
Merci Hélène ! Un grand plaisir à explorer, relier et écrire.