« Comme une poire coupée en deux », en haut la queue un peu épaisse pour une queue, en bas ça s’élargit comme une poire, le trait part de la base de la queue et s’incurve doucement pour aboutir au centre du renflement, à la base du fruit. Il y a deux autres tracés qui correspondraient à un épluchage grossier de la poire, ils partent tous les deux de l’autre côté de la queue pour suivre pour l’un (celui de gauche) l’arrondi de la poire dans le bas en éliminant dans le haut une partie gâtée du fruit, pour l’autre celui de droite, bien plus soigneux l’exact contour du fruit. Ces traits figurés sur la carte ont des noms, une histoire, des concepteurs, des conséquences : ce sont les tracés routiers qui traversent la commune de Lissieu, commune en forme de poire (ça tombe bien on est au pays de la poire) parfaitement orientée nord-sud, l’autoroute A6 qui coupe la poire en deux, l’ancienne nationale 6 qui épluche grossièrement le fruit à l’ouest et la départementale 42 qui suit idéalement la limite de la peau à l’est. Les routes sont faites pour relier les territoires entre eux, les autoroutes aussi après les avoir tranchés par le milieu, car on ne traverse pas une autoroute aussi facilement qu’une route. Lissieu ne connaît que quatre points de franchissement de l’autoroute : deux au-dessus, deux en dessous, une maille à l’envers, une maille à l’endroit. Pas de station de péage, pas d’aire de repos, pas d’échangeur ni de bretelle d’accès, juste un mur anti-bruit quand l’autoroute passe à 50 m du bourg de sa mairie et de son clocher. On traverse Lissieu sans le voir, on l’habite presque en l’ignorant, s’il n’était ce bruit que le vent apporte parfois jusqu’aux confins de la commune.
Des communes coupées en deux par une autoroute, il y en a beaucoup, aussi parfaitement que Lissieu je ne sais pas. Je me souviens gamine de la commune de mes grands-parents coupée par ce qu’ils appelaient la déviation et qui les coupait tout simplement de leurs champs et de l’Isère où je suis allée une fois pécher la truite avec mon grand-père. Des villes coupées en deux, des îles, il n’est pas difficile d’en faire la liste, des communes on en parle moins. Qu’est-ce que cela fait d’être coupé en deux ? Cela m’évoque irrésistiblement les enfants dont les parents divorcent et qui se retrouvent d’un jour à l’autre avec deux maisons, deux villes, deux pays et les soucis des trajets entre les deux.
Bonjour Danielle,
et déjà le plein d’histoire ! oui…la liste des villes coupées en deux…ça serait une sacrée liste, dans chacune une histoire coupée en deux de part et d’autre…. A vous !
merci Catherine de ta lecture. A plus.
« car on ne traverse pas une autoroute aussi facilement qu’une route. »
Cette commune coupée en deux – en effet on ne la rencontre pas quand on passe sur l’autoroute. Quelle belle entrée en matière !