La main, première complice du secret. Ce qui naît dans le tréfonds de la pensée lui appartient d’abord, avant la lettre, le mot, la phrase, avant toute graphie. Contenu là, cela surgit sous les doigts, aussitôt parce que cela brûle et détruit tout à l’intérieur, ou bien d’avoir été conservé si longtemps, ruminé, regretté peut-être. La main, dépositaire du plus intime, du plus inaudible, du plus enfoui, de l’inexprimable. Elle pianote et le scripteur regarde s’inscrire le secret sous ses yeux. Dicté par une succession d’émotions contradictoires – et alors souvent indéchiffrable – ou par la seule volonté de le déposer – se délester de son poids, de sa charge affective, jeter son vitriol où il ne nous atteindra plus – il s’étale, se répand noir sur blanc, et sa lecture aussitôt le condamne à rejoindre le lieu sombre d’où il est issu. Alors les rayures, les biffures, les hachures se chargent d’en effacer la trace. Le secret se replie dans le papier, illisible à tout autre que l’écriveur. Que le secret regarde une personne et son nom s’efface où n’est réduit qu’à un X ou un Y, pas même l’initiale d’un prénom, qu’il raconte une situation, une circonstance, une manœuvre, une intrigue, et l’ellipse vient au secours de la pensée. Le récit en est parfois tellement abscons que l’auteur se relisant ne saurait même plus de quoi il retourne…
Impression forte (bien vue) de ce démarrage sur la main
Merci, Christophe. C’est l’impression toute personnelle que je ressens… le corps d’abord, avant l’écriture !