Inspirée d'un souvenir de vacances, merci à Cécile.
France-Portugal – Les années 2000.
Avaient ils déjà deux enfants ? Elle ne souvient plus –
Il faudrait aller regarder dans les photos, les archives, il faudrait qu’elle se lève de la table pour aller voir mais elle ne bouge pas. Elle se souvient, vaguement, que c’était un noël – Un noël où ils avaient décidé de partir, loin de la France, des festivités, du sapin et s’en aller vers le Portugal. Ponte de Lima exactement, dans les montagnes, près des eucalyptus, et sous les orangers, une des plus anciennes villes de là-bas.
Ponte de Lima en voiture, trois jours de voyage – Biarritz, où ils ne verront pas la mer mais où ils dormiront à l’hôtel au bord de l’autoroute. L’Espagne avec ces routes où aucune aire de service n’est ouverte avant 17h et où les seuls aliments pour bébés qu’ils ont trouvés sont du jambon cuit ou fumé. L’Espagne et ces petites maisons, ces routes sans péages ni radars, l’Espagne et Valladolid où ils dormiront encore une nuit avant de repartir. L’Espagne qu’ils traverseront à toute vitesse jusqu’à arriver dans un petit village désert ressemblant à des images du Mexique vues dans les films étrangers en ralentissant un peu, car brusquement, deux flics en jailliront de derrière un fossé pour les arrêter mais les laisseront repartir en leur disant de ralentir.
Et enfin après plus de 1586 km, le Portugal.
Il fait nuit, il est tard, ils sont éreintés, la fille pleure, le petit s’il était déjà là, dort. Bref, enfin arrivés, ils vont pouvoir se reposer. Ils se garent devant la maison qu’ils ont loué. Tout est sombre sauf une lumière par les fenêtres. « Tiens, il y a du monde, ce doit être les propriétaires « . Ils frappent à la porte, prononcent un « bonsoir, nous venons pour la location » – « quelle location ? » leur demande un grand gars costaud pas commode. « Ben la location sur Internet pour la semaine de Noël » « Il n’y a pas de location pour cette semaine « . « Mais si, on a réservé, tenez on a les papiers d’internet, tiens montre leur ! » Ils montrent les papiers. Le gars vaguement regarde d’un oeil mauvais. « Vous vous êtes trompés, ce ne sont pas les bonnes dates » « Mais non, qu’est ce que vous racontez ? » « Vous vous êtes trompés, ici c’est chez moi et là dedans, c’est ma famille, allez-vous en ». Le père commence à élever la voix : « Mais ce n’est pas possible, nous avons payés, nous avons fait trois jours de voyage, il y a les enfants, nous sommes fatigués ». Le grand costaud se redresse. De l’intérieur, un autre arrive. Ils baragouinent quelques mots en portugais qu’eux seuls comprennent puis le grand costaud dit de sa bouche écumante et édentée : « Caralho, Filho da puta, je m’en fiche, partez ou j’appelle la police ». « Mais » proteste le père mais déjà le deuxième apporte le fusil. Ils reculent et s’enfuient.
Ils sont là dans les montagnes, sous la nuit étoilée, les filles pleurent sans bruit, le père est debout, près de la portière, et déjà, on entend les premières bêtes sauvages hurler…
Étrange histoire, où le réel a basculé…
Que faire après ces trois jours de route ?
Merci Clarence pour cette lecture étonnante !