Le Liban, une rue sale et sombre, des échoppes mal famées, un trafic de voitures incessant, la poussière sur les vitres, des devantures déchirées, une arrière boutique louche. Il marche dans la rue quand tout d’un coup sur le trottoir d’en face, il le voit. Il le reconnait tout de suite, il se cache de peur d’être repéré, il y retournera le soir même.
Dans un pick up, une camionnette, il est 7 heures du matin sur une longue route longeant l’océan. Le soleil commence à peine à se lever. Les trois adolescents rentrent, épuisés, de leur séance de surf à l’aube, un seul d’entre eux conduit. Personne sur la route mais un panneau, un grand panneau. Les garçons s’endorment au volant.
Un village dans le Nord de la France, l’épicerie café de ses parents, elle joue au vélo rouge dans la rue, les passantes rentrent dans la boutique, elle joue avec ses copines.
Dans Paris, toujours la nuit, toujours quand le bébé dort, elle sort et elle marche dans les rues. D’abord dans la sienne, puis dans celle d’à côté, puis dans celle un peu plus loin. Une nuit, elle s’arrête au café, traîne et se dépêche ensuite de rentrer. Il fait nuit, elle sent le vent, elle sent la liberté, elle respire, elle a envie de danser, elle sent l’excitation et la peur aussi. Si on savait ce qu’elle faisait mais elle ne veut pas y penser, elle marche en regardant ses pieds. » Demain, se dit-elle, je prendrai le métro. »
Une rue, une rue unique, une rue à un seul comme on l’appelle là bas à Médina, je crois bien. Une rue si étroite et si longue que seule une silhouette peut y passer, pas deux. De longs murs ocres, un soleil brillant au dessus, de grandes fenêtres avec volets et du linge qui pend. Une rue unique où on ne peut marcher qu’à une seule personne sans jamais pouvoir se croiser. Une rue à un seul comme on l’appelle là bas.
Une ville péri-urbaine, le 77, une nationale et un abri-bus où il passe ses journées assis, casquette sur la tête, musique dans les oreilles, sur un banc en plastique, à côté d’une affiche du Conseil Départemental.
Paris, quartier saint Michel, magasin de disques et librairies, il vend les vinyles dans la boutique, la musique en jaillit, les gens s’agglutinent, il est le roi. Et je ne sais plus pourquoi, il n’y travaille plus et s’en va errer dans les rues de la Capitale, dans les parcs, dans les impasses, dormir sur les bancs et se perdre lentement.
vignette choc celle des adolescents, mélancolique celle de l’abri-bus, je n’ai pas encore écouté la consigne, tu me donnes envie …
Merci Cécile, ravie de savoir que je te donnes envie !
Beaucoup aimé tes villes littéraires, Clarence ! Elles m’aident à contrebalancer les souvenirs négatifs que j’ai des miennes. Merci !
Je n’ai pas eu le temps Héléna d’aller voir tes villes mais je n’y manquerai pas. A bientôt.
Très réussi, et j’y ai reconnu des villes lues, alors merci double merci, car ces esquilles, ces esquisse sont des bouts vivants de nous, cette proposition permet de les traverser, et ta manière en est une belle broderie,
Merci Catherine pour la broderie, je trouve cela très touchant cette expression pour parler d’écrits. Et merci pour ta réponse sur Facebook, je vais pouvoir faire des liens. Belle journée.
Très belle série de souvenirs de lecture.
La ville est là. Toujours.
Merci Clarence !
Merci beaucoup Clarence pour ces fragments de vie – poignées géographiques si denses, les yeux dans la rue, la douce balade en Médina, la douleur, l’ennui matériel , si palpable, le rêve planté en abribus, dérives…
là aussi me parlent tellement
Merci Françoise pour ton regard sur mes textes-
Et j’ai été très touchée par la lettre de tes élèves, c’est tellement important ce qui vous marque adolescent sur le lien et la confiance à l’adulte. Ils ont beaucoup de chance de t’avoir –
A bientôt dans tes écrits.