Les occupations des petits-enfants ça a commencé comme ça pour elle, les longues bobines des tisserands à domicile piquées de quatre clous et les restes de pelote de laine pour les pulls, son père lui faisait des dessins à colorier avec des crayons de couleur, et ensuite les colliers de nouille pour la fête des mères, du découpage de papier en lanières pour quadrillages tressés, il leur avait appris à fabriquer des kaléidoscopes un tube en papier et un pliage en carré remplis de tous petits papiers perles bouts de miroir cassés enfilés dans le tube. Quand elle a eu ses petits-enfants, elle a été enchantée de découvrir les premiers magasins de ce qu’on a appelé les travaux manuels, elle avait commencé avec de la farine de l’eau du sel, la pâte à sel mais une fois fabriqués-maison les dinosaures les niches et chiens les tables et chaises, il fallait les conserver, alors cuisson au four et acheter peinture pinceaux et vernis. Elle aimait aller dans ces magasins, pouvait y passer trois heures, à peine entrée, en premier le nécessaire pour la peinture, et là à coté les perles toutes petites les fermoirs pour colliers, les pots animaux personnages en terre cuite les objets en bois à peindre coffrets plateaux lettres et puis les papiers, leur grain les couleurs du plus tendre au plus tapant, les formats carrés pour l’origami, avec des modèles infinis, les minuscules carrés de mosaïque, tout donnait envie, tout était beau. Plus tard sont arrivés les loisirs créatifs, scrapbooking, sets tout prêts avec un emballage carton décoré et coloré, sets pour pâte à sel sets pour tricoter un bonnet sets de mosaïque horriblement chers et pas toujours de bon goût, et pré-préparés, tout cuit, pas d’invention.
Le DIY était tout fini avant d’être pensé. Les magasins se multipliaient, les inventions farfelues aussi, les entrepôts étaient de plus en plus grands, elle regardait les sites, de mille neuf cent soixante dix neuf aux années deux mille vingt, les lieux de stockage étaient passés de trois mille mètres carrés à douze mille puis quinze mille pour vingt mille cartons, ces endroits où les humains devenaient des robots avec au poignet un bracelet électroniques leur disant seconde après seconde les tâches à effectuer. Et puis elle a vieilli, plus de forces pour rester deux heures dans un magasin, les enfants ont grandi, et ça a fini comme ça avait commencé, plus besoin d’acheter, elle redécouvre les pompons la récupération des cartons de papier wc les cartes en carton brodés de ses mains elle a des fonds de tiroir de fils colorés de bouts de laine, elle ramasse de la mousse des petits bouts de branche, des cailloux du bois pour des paysages inventés. On n’a plus besoin d’acheter quand on est vieux et pas envie. On regarde avec émotion tous les trésors laissés par ses petits-enfants, elle n’achètera plus, La pâte à sel c’est super.
Merci Simone! Heureux souvenirs des petites mains dans la pâte à sel loin de la création DIY « pas toujours de bon goût » de la société de consommation.
Le catalogue « loisirs créatifs » pour la #29 est-il envisagé?
Merci, tu m’as aidée à ne pas y mettre 4 heures, comme d’habitude. Pas tout à fait un catalogue, mais dans l’idée.
une belle tranche de vie nostalgique un peu à la fin. Merci