Qu’est-ce que t’as fait ? Bon sang, qu’est-ce que t’as fait ? Comment t’as osé ? Qu’est-ce qui t’a pris ? La peur ? La honte ? Tu te savais aussi infâme ? Comment tu t’es débrouillé pour les papiers, l’argent ? Tu te rends compte que ça te lâchera plus ? Que t’es à l’abri nulle part ? Tu te crois en sûreté là où personne ne sait d’où tu viens ? Tu crois que tu pourras vivre tranquille ? Jusqu’à quand tu seras capable de mentir ? Tu te sens bien en trahissant la confiance de ceux qui ne se doutent de rien ? Et ceux que tu as laissés derrière toi ? Ta famille ? Tes amis ? Tu n’y penses pas, tu ne t’en fous ? Tu crois que tu pourras continuer ton jeu pendant combien de temps ? Tu ressens encore de la joie, du plaisir à vivre ? Tu crois te racheter ? Avec quoi ? Tu te crois malin ? Avoir choisi un endroit où tout le monde peut te reconnaitre ? Tu penses y cacher ton acte ignoble ? Qu’est-ce que t’attends de la vie ? Tu penses en effacer une moitié pour pouvoir profiter de l’autre ? Tu te crois encore vivant ?
Qu’est-ce qui te tourmente ? Pourquoi ces silences, ces réponses fuyantes, ces gestes d’animal traqué ? Cette inquiétude quand quelqu’un t’interroge avec un sourire ? Quelle est la source de ce mystère qui m’attire et me fait peur ? Qu’est-ce qui te rassure et console ? Qu’est-ce je signifie pour toi ? Un passetemps, une lubie, un entracte ? Que puis-je faire pour ôter ce voile qui assombrit ton regard ? Où t’es-tu perdu ?
Que cache-t-il ? D’où est-ce qu’il sort ? Qu’est-ce qu’il est venu faire ici ? Quel est son secret, son point faible ? Pourquoi est-il arrivé les mains vides, juste un sac en bandoulière qu’il ne lâche pour rien au monde ? Pourquoi est-ce que je ne crois en rien de ce qu’il dit ? Et les autres, ils ne se méfient pas ? Il se croit à l’abri ? Pourquoi il me regarde comme si je savais déjà ? Qu’est-ce qu’il a qui me fait frémir et le redouter ? De quoi est-il capable ? Pourquoi ce manque de curiosité, cette absence de questions comme si plus rien ne le traversait? D’où lui vient cet effarouchement, cette obstination, cette dureté ? Que rumine-t-il quand il s’assoit en silence sur le banc de ma cour ? Dois-je le dénoncer ? Arrête-t-on quelqu’un à cause d’un regard ?
Trois salves de questions qui définissent un portrait en creux.
Bravo pour ce beau montage de textes, fort agréable à lire !
Merci, Fil !
trois questionneurs, euses, trois façons de voir le questionné, bravo.
Merci, Laurent !
Merci Helena. Où nous sommes nous perdus ?
Oui, où ! Merci, Ugo !
cette succession ininterrompue de questions nous donne peu à peu des indications sur ce qui s’est passé
dessine en effet quelque chose en creux des faits et des personnages
et on s’aperçoit à quel point un certain nombre de ces questions pourraient s’appliquer à bien d’autres situations: » Et ceux que tu as laissé derrière toi ? » ou « Tu te crois malin » ou « Qu’est ce que je signifie pour toi? ».. la force du langage
Oui, c’est vrai ! Merci de me le signaler. J’étais tellement dans le personnage que je ne l’avais pas remarqué ! Merci encore !
Le passage de l’adresse au questionnement intérieur; de l’injonction brutale à une certaine empathie, conjugaison de regards, sentiments contradictoires … portraits démultipliées en « questionneuses-rs/ questioné »
Oui, Nathalie, c’est effectivement cela ! Personnage assailli ! 🙂
Merci de ta lecture et de ton retour !