L’eau est bonne Je flotte au-dessus des poissons. Parfois, une vaguelette cogne mon menton puis file sur les côtés mais, la suivante saute au-dessus de mon menton et entre dans mon nez par mes trous de narine. Où passe-t-elle ensuite ? Je secoue la tête, chasse l’eau de mes oreilles avec les petits doigts. Je sors de l’eau, atteins le sable frais puis chaud, puis très chaud, je retrouve mes tongs et les chausse. Je lève la tête, une publicité pour une boisson rafraichissante sur un grand panneau en bois Je passe en-dessous. Le sable, le sable, le chemin en bois, les lattes du chemin en bois, des clous rouillés dans les lattes du chemin de bois, le béton du parking, les lignes blanches peintes sur le béton du parking, une voiture vert pomme, le radiateur de la voiture, le moteur et ses joints de culasse, son filtre à huile, le liquide lave-glace, le tableau de bord, sur le siège avant du véhicule, le volant dans le dos, le siège arrière passager gauche, un chien haletant sur le siège arrière passager droit, je n’ai rien à te donner mon vieux, le coffre, vide ? non, un triangle de signalisation et un cric, le hayon de la voiture vert pomme, le béton du parking, la façade du supermarché, la vitre du supermarché, l’image d’un pot de glace sur la vitrine du supermarché, le congélateur à l’entrée, le bruit d’un manchot qui se secoue sur la banquise, une bouteille d’huile d’olive, encore mouillé je flotte, un paquet de corn-flakes, ça crisse on s’y enfonce, un paquet de lessive, faire vite c’est dangereux, un fromage de brebis à trous, d’un côté et de l’autre les trous sont face à face, entre les deux une fine membrane, l’acier du rayon, la cheville dans le mur, le mur, le salon de l’appartement de la libraire, en location, il n’y a qu’un canapé, une table et deux chaises, le dessin d’une plage et son palmier sur le mur blanc, le couloir commun de l’immeuble, la petite cour de l’immeuble, une plante en pot, je continue ou je m’enracine, le restaurant en bois, une table, deux tables, trois tables, quatre tables, la vaisselle éclatante, cinq tables, la façade du restaurant en bois, le tronc d’un arbre, la rue, un passant, peau, os, cœur, poumons, un passant dans le dos, le trottoir s’ouvre, la place. Je m’assois — A limonade, home made, please — parakalo
Quel beau texte passe-muraille, train de l’invisible jusqu’au zoom accéléré du dénouement, audacieux !