Midi dix à l’horloge de l’usine : les tatoueurs sont assis sur un vieux siège de voiture défoncé, ils boivent des bières, attendent d’improbables clients. Midi dix à l’horloge de l’usine : photo de la fanfare, on tient à peine tous sur les escaliers, casquette bien droite, cravate serrée, sourire de circonstance. Midi dix à l’horloge de l’usine : la muette balaie les feuilles mortes. Midi dix à l’horloge de l’usine : le jour se lève et passent les enfants, en sautillant ; une petite fille s’emmêle les jambes, elle tombe, son cri réveille le vieux moustachu. Midi dix à l’horloge de l’usine : le jour tombe, ils se sont donné rendez-vous, il est un peu en avance ; quand elle arrive, il baisse les yeux, puis ils s’en vont derrière, ou devant, ils ne savent plus trop. Minuit dix à l’horloge de l’usine : un chat, puis une voiture ; les freins crissent, le chat continue son chemin, comme si de rien n’était. Midi dix à l’horloge de l’usine : les voitures en file devant les barrières, un train, des klaxons. Midi dix à l’horloge de l’usine : sur le camion, c’est une carcasse de baleine. Minuit dix à l’horloge de l’usine : le soleil tape fort sur le bitume, personne n’ose sortir de chez lui. Midi dix à l’horloge de l’usine : des portes, partout des portes ; mais il n’y a plus d’horloge à l’usine.
Vincent, je trouve ton texte très poétique.
Il me fait penser à l’Amérique profonde, je ne sais pas pourquoi.
Merci !
Midi dix, l’horloge s’est arrétée; il sera quelque soit l’heure toujours midi dix – pour moi. Merci