« Fermez les yeux, ouvrez la fenêtre, ouvrez les yeux ; si la lumière ne vous convient pas, refermez les yeux, refermez la fenêtre, essayez une autre fenêtre ».
Arthur Köpcke, Fluxus International & Co
Jeter systématiquement les noyaux d’abricots qu’on mange dans son jardin, en visant toujours le même endroit, en attendant qu’un arbre pousse à cette place.
Sur le rayonnage d’une bibliothèque municipale, changer l’ordre des romans, pour l’ordre des couleurs de la tranche de leur couverture.
Ramasser tous les mégots de cigarettes abandonnés au sol, en récupérer le peu de tabac qui reste à l’intérieur pour rouler de nouvelles cigarettes et les offrir à ceux qui nous en demandent alors qu’on ne fume pas.
Embrasser généreusement sur la joue tous les passants sans distinction sur le chemin de son travail.
Utiliser une télécommande universelle pour éteindre les télévisions dans les cafés.
Traverser la rue systématiquement quand le feu est vert et le bonhomme est rouge.
L’automne, ramasser les feuilles mortes tombées par terre pour les disposer en tas sous l’arbre en fonction de leurs tailles et de leurs couleurs afin de créer un élégant dégradé.
Chaque jour, donner un léger coup d’ongle sur le tronc d’un arbre, toujours au même endroit.
Sonner à l’interphone des immeubles de sa rue sans attendre de réponse.
Voler systématiquement les journaux qui dépassent des boites aux lettres de son immeuble pour les glisser chez ceux qui ne sont pas abonnés à ce journal.
Chanter tous les soirs le même air à la même heure aux fenêtres de son immeuble.
Fenêtre ouverte, taper avec force, sur une batterie de casseroles tous les soirs à 20h.
Tous les soirs, ouvrir sa fenêtre et prendre une photographie avec un flash, en supprimant le fichier sur sa carte mémoire juste après avoir pris la photo.
Foncer droit sur toutes les personnes qu’on croise dans la rue tête inclinée au-dessus de leur téléphone portable sans s’arrêter même si la personne ne vous voit pas arriver sur elle et risque de se cogner contre vous.
Voler un livre à chaque fois qu’on en achète un dans une librairie.
Crier très fort un mot absurde, juste après avoir croisé un inconnu dans la rue.
Sourire pendant cinq minutes sans s’arrêter tous les jours à 12h12.
Rester immobile cinq longues minutes, au milieu de la rue, sur le trottoir, sans rien dire ni réagir aux regards des passants.
Tous les jours prendre un raccourci pour relier plus rapidement un endroit à un autre de l’autre côté d’une pelouse, jusqu’à faire apparaître progressivement une ligne de désir.
Arracher toutes les dernières pages des livres de romans policiers dans une bibliothèque municipale.
Quelle surprise ! quelle fantaisie que ne laissait pas percevoir vos autres textes. très plaisant.
Ah ! Ah ! Oui c’est vrai que c’est assez différent de ce que j’écris habituellement, mais l’exercice nous y incite qui penche du côté des pratiques artistiques. Quand on évoque l’intervention humaine dans l’espace publique, je pense immanquablement à cette scène du film « Mes chers amis » de Mario Monicelli où Noiret, Tognazzi et leurs amis attendent le départ d’un train pour donner des claques aux passagers qui mettent leur têtes dehors.
merci pour la référence, je ne connaissais pas.
l’avant dernière, en vérité… (et le film de Monicelli oui)
En vérité Piero, il n’y a pas que l’avant-dernière, mais oui c’est celle à laquelle je suis le plus attaché.
J’adore de la première à la dernière ! Merci Philippe. .’
Merci beaucoup Marie, j’aime l’idée qu’il y ait rien de moins protocolaire que les protocoles qu’on s’invente soi-même !
Très belle galerie de protocoles. Voilà un texte bien inspiré !
Merci Philippe.
Merci Philippe, j’avoue que mes lointaines études en art et en cinéma m’ont un peu aidé pour élaborer ce texte, mais également le souvenir d’avoir fait travailler mes étudiants à Sciences Po en atelier d’écriture sur la ville, sur des instructions pour marcher en ville qui nous avaient menées assez loin.
ben ça alors, cher Philippe, vous passez votre journée à mettre en place des protocoles, à toutes les heures il y en a un nouveau
ça alors
c’est très drôle, et oui bien d’accord pour rassembler les feuilles mortes au pied des arbres pour dessiner des dégradés, et en plus ça fait du compost juste là où il faut…
(au fait, je vous ai envoyé un petit message via Messenger, une petite demande.. vous n’avez pas dû voir… merci de me répondre… amitié)
Merci Françoise, bien sûr je ne pratique pas réellement tous ces protocoles, mais quelques-uns oui. J’aimerais pouvoir les assumer et les réaliser. Pour ton message, je l’ai bien vu hier, j’y ai répondu positivement sur Messenger, tu n’as pas eu ma réponse ? Je viens de t’envoyer un message mais il m’est revenu. Problème sur ton site. Dans tous les cas, il n’y a pas de souci, tu peux bien sûr utiliser l’extrait pour ton atelier.
Merci Philippe ! C’est réjouissant. Vous osez ! Et c’est libérateur !
Merci beaucoup Émilie, si j’osais vraiment je les mettrais en pratique au quotidien, mais c’est aussi pour ça qu’on écrit, aller plus loin que ce que l’on vit chaque jour.