#40jours #21 | si on remballe, qu’est-ce qu’on remballe?

Tentative de protocole visant à produire la mémoire d’un événement à peine passé. Produire les réalités de l’événement, les combiner pour en condenser le sens. L’événement en question est un effacement. L’effacement d’un théâtre et la performance qui en a résulté, intitulé « On remballe ». « On remballe » pourrait se décliner selon trois signification: la première, la plus simple, « c’est fini, on remballe »; la seconde, « on remballe » les effaceurs (en l’occurrence les pouvoir publics), on les remballe (par l’événement ils se font remballer); la troisième, c’est l’annonce de l’évènement, « voici la Soirée-performance intitulée “On Remballe” ». Importance du protocole pour ne pas tomber dans les polémiques de cours d’école de la politique locale. Premier temps du protocole #collecte (durée une semaine). Nombre de participants: les artistes, le personnel, les services civiques, les volontaires. La constitution de l’équipe est intégrée au protocole: annoncer en ligne le recueil des traces). D’abord, les images, le théâtre, vue de dehors, la nuit, le jour, traces du lieu qui vit. Le jour de l’effacement. Pas de rétrospective (sauf pour le compte à rebours, voir plus bas). Les films, récupérer les rushs de la soirée. Tous les rushs. Les photos du déroulé. Il s’agira de rassembler tout ce que l’événement contient de vie, de collecter tout ce qui a été écrit sur les réseaux sociaux, utiliser les # pour repérer les photos, vidéos, posts et emojis. Le compte à rebours de l’annonce. Chaque jour J-30, J-29, J–28, etc. Jusqu’au jour J. Sentir la sensibilité de l’événement. Identifier la chronologie, mettre côte à côte toutes les photos prises sur le photomaton lors de l’événement, tous les messages postés, les lettres reçues, les emails envoyés de celles et ceux qui ne pouvaient pas être là (l’événement vaut aussi par les absences), les verres bus, combien, de quoi, vin, bière, jus, limonade, eau. Le nombre de cartons de pizza empilés. Fixer une heure. Une période, disons entre 16h et 4h00. Douze heures. Lister les événements. Arrivée du food-truck qui doit faire une marche arrière pour se positionner en travers du théâtre, côté Est. Installation du camion à pizzas, sur le même trottoir, mais parallèlement au théâtre, côté ouest. Nuages menaçant, ciel gris corindon puis gris charbon de bois foncé, puis l’arrivée des mamans avec les enfants, trempés qui traversent en courant depuis l’école et descendent à la braderie dans les loges, en sous-sol. Faire l’inventaire de la braderie. Vêtements (déguisements), affiches… Liste de ce qui a été vendu (chapeaux, robes, cravates, chaussures…). Liste des prises de paroles. Liste des sourires et des pleurs. Liste des déclarations d’amour. Identifier les épisodes météo (les orages qui ont rythmé l’occupation du trottoir et les moments où le théâtre est devenu, au sens propre, un abris, comme il l’a été à Marioupol, avant que les Russes… Imaginer, toutes ces personnes présentes lors d’« on remballe », vivant là, dans le théâtre, les sous-sols, les bureaux…). Faire parler celles et ceux qui étaient là. Micro, caméra, raconter le vécu. Rapporter tous les mots. J’suis vénère, j’suis dégoutée, j’suis en colère… Je me souviens, je me rappelle. Mes amis, mais pourquoi? Ramasser les supports, flyers, communiqués, tickets pour les boissons, affiches. Second temps du protocole: « on s’enferme ». Vingt-quatre heures ensemble à produire l’histoire des douze heures (qui? l’équipe du recueil, d’autres?). Le protocole doit aussi fixer la participation. Articulation des images (fixes, films..) et des textes recueillis, production de nouveaux textes, de nouvelles images sur la réalité en train de se réaliser, qui disent la réalité rendue possible par le recueil. Invention des supports de diffusion de cette réalité, explosion du réel et dispersion de ses fragments en livres, posts, articles, vidéos, réseaux sociaux…
Revenir, vite, sur ce déjà passé. 30 juin 2022, on ferme un théâtre. Et il reste quoi ? Et on en fait quoi? quand les artistes et les équipes ont tellement d’élégance qu’ils ne lèvent pas le poing mais ouvrent les coeurs ?